Oublions Bergmann, refusons de nous agenouiller devant ce qui fait ou doit faire autorité et tentons de recevoir ce film pour ce qu'il est... Difficile d'y voir plus qu'un road movie sans rythme, bavard , horriblement dialogué, doublé de cette volonté prétentieuse en plus de vouloir transcender le genre. Les personnages secondaires sont caricaturaux, de pauvres marionnettes qui n'ont d'autres fonctions que de faire parler les principaux sur ce qui les travaille; le vieillissement, le couple, l'enfer conjugal etc... Faut il évoquer aussi les scènes lourdingues de rêves et tout ces plans symboliques qui empruntent le pire du cinéma expressioniste... Alors on trouvera toujours des gens tres instruit qui viendront vous expliquer la portée de tel dialogue sur tel gros plans sur tel note de musique etc... Mais je m'en fou, en comparaison ou mise en perspective; le cinéma de Mizoguchi oyu Kurosawa savait être passionant sur l'intime, lyrique, populaire et foisonnant dans le romanesque. Les fraises sauvages manquent cruellement de gout.
Chef-d'oeuvre de Bergman , un de plus. On est transporté dans ce voyage , avec les personnages , les souvenirs du docteur . Les personnages secondaires donnent une note comique au film. La psychologie entre les protagonistes y est fortement représentée , chacun peut se faire un avis , qui va changeant. Du grand art.
Isak Borg, un vieux professeur de médecine de 78 ans, doit se rendre à l'université de Lund pour son éméritat. Et le voyage qui l'y conduit est l'occasion pour le vieil homme d'un autre voyage, introspectif celui-là, qui va le mener à récapituler son existence pour en faire le bilan. L'autre chef-d'oeuvre, avec "Le septième sceau", de la seconde manière de Bergman (celle où il affirme sa personnalité propre et qui laissera la place au début des années 60 à un style plus dépouillé et austère avec la trilogie sur Dieu), "Les fraises sauvages" constitue aussi l'un des films les plus oniriques de son réalisateur. On y observe une imbrication mutuelle du rêve, ou plutôt du cauchemar, et de la réalité qu'on ne retrouvera avec cette intensité que dans "L'heure du loup". Deux prodigieux morceaux d'anthologie sont à cet égard à évoquer: le cauchemar initial où Isak se découvre dans son propre cercueil et la scène centrale où le tribunal de sa conscience se matérialise en une sorte d'examen de médecine fantastique. On a en effet rarement été aussi loin dans l'incarnation cinématographique du rêve. Méditation sur les thèmes de la mémoire et de la culpabilité, "Les fraises sauvages" participe par ailleurs du même style fantasmatique et modérément baroque que "Le septième sceau", et il jouit, comme ce dernier, d'une photographie splendide, faisant notamment un usage étonnant de la surexposition lumineuse. Je n'insisterai pas davantage, "Les fraises sauvages" constitue à nouveau un chef-d'oeuvre absolu de Bergman (un de plus!) et une pièce majeure de mon panthéon cinématographique subjectif.
Pourvoyeur d'images de génie, Ingmar Bergman tient aujourd'hui, dans l'univers cinématographique, une des toute première place. La force de son oeuvre, ses réflexions austères mais d'une portée universelle, son originalité, son style qui est celui d'un créateur et innovateur à part entière, son écriture si particulière ont fait de chacun de ses films un événement justifié. Aussi comment entrer dans cette vaste filmographie sans être désorienté ? Il me semble que " Les fraises sauvages" peuvent être une introduction valable à une oeuvre dense et difficile qui se nourrit d'humanité, mais qui a toujours intimidé le néophyte. Bergamn est l'auteur de la solitude et ce film aborde le sujet à travers le personnage d'un vieil homme qui vient de recevoir une distiction honorifique, couronnant sa carrière de médecin. A la suite d'un rêve, il bouscule ses plans et décide de se rendre en voiture à Lund avec sa belle-fille, ce qui lui permettra de croiser des lieux chargés d'évocations et de souvenirs.Ce sera également l'occasion de revivre certains d'entre eux et de faire le bilan de sa longue existence. Mais heureusement des personnes rencontrées vont l'aider à se réconcilier avec un passé chargé d'échecs sentimentaux et d'éclairer ses vieux jours d'une lueur de tendresse. En effet, une fois arrivé à Lund pour y recevoir sa récompense, le vieil homme, ébranlé dans ses convictions, prend la résolution de tenter d'agir de façon à entretenir désormais des rapports moins formel avec son entourage. Un film d'une grande rigueur esthétique, admirablement interprété par Ingrid Thulin, Bibi Andersen et Victor Sjöström, où rêve et réalité, passé et présent sont sans cesse confondus dans une orchestration symphonique d'une poignante beauté.
Les fraises sauvages n'est peut être pas le chef d'oeuvre de Bergman (le film a peut être quelques scènes datées et académiques) mais il reste un grand et beau film émouvant. D'une facture très classique, un schéma narratif qui a le vecteur de beaucoup de films, Les fraises sauvages raconte la trajectoire initiatique qui doit amener le professeur Borg a se préparer à une mort prochaine par l'acceptation d'un style de vie égoîste dont le manque d'écoute envers ses relations lui reviennent à l'esprit par des rêves récurrents et morbides et la résurgence de ses souvenirs d'enfance et de jeune homme. Ingmar Bergman filme Les fraises sauvages à l'aide d'une très belle photographie qui donne à la nature un bel aspect buccolique. Le noir et blanc est très soiigné et la musique discrète à point. Les rêves surréalistes (le mort dans le cercueil d'où suinte un liquide nauséeux, les pendules sans aiguilles), au contenu souvent vu, sont brillament représentés et décryptés selon le modèle freudien. L'humour (voir le rêve où les qualités professionnelles sont remises en cause), les rapports de vieux couple entre le professeur et sa servante ou les personnages qui remplissent la voiture est loin d'être absent. Déjà, Bergman montre ici ses obessions (les personnages décrits sans complaisance, les rapports au sein du couple et dans la famille) d'une façon très personnelle. Il faut saluer les interprétations inoubliables de Victor Sjostrom, Bibi Andersson, drôle et mignonne et de la bombe Ingrid Thullin tous habitées. La version française est belle et personnelle. Un film charnière.