Les années 70 marquent l’apparition de quelques films de guerre légers, ironiques voire même carrément moqueurs de cette mouvance héroïque propre aux fantassins des grands conflits passés. En cela, au même titre que Catch 22 et Mash, De l’or pour les braves, signée Brian G. Hutton, est avant tout un film d’aventure, une comédie et un film d’action, ayant pour cadre la deuxième guerre mondiale. Ici, les bidasses américains ne sont pas en quête de gloire, mais d’un magot. L’ironie est cinglante alors que jusqu’alors le sacro-saint soldat des troupes alliées était l’archétype du héros au 20ème siècle. Mais qu’on ne confonde surtout pas ce type de produit avec petite production moqueuse. Faute à ne pas faire tant le travail de mise en scène de Hutton, les moyens techniques et logistiques mis à disposition pour ce type de production sont similaires à ceux déployés pour des œuvres marquantes tels que le Jour le plus long ou encore Un pont trop loin.
En somme, malgré l’esprit rebelle du scénario et une addition de personnages déjantés, De l’or pour les braves est un solide brûlot guerrier. Clint Eastwood, pas nécessairement le plus connu au casting d’alors, prend l’entreprise à bras le corps, ténébreux comme jamais au beau milieu d’une troupe de bras cassé dont la seule autorité est Telly Savalas, en sergent sérieux mais crapuleux. Outre d’anciennes gloires maintenant reléguées à un collectif de mémoires, le casting comporte également un Donald Sutherland en mode déjanté. Les acteurs sont donc excellents, incarnant des soldats immoraux, souvent fous, dans un univers bien connu, celui de l’héroïsme.
Les décors, eux aussi, sont fantastiques. Tourné dans les républiques d’ex-Yougoslavie, le film est une formidable carte postale, en dépit des invraisemblances géologiques entre le France du récit et les Balkans filmés par Hutton. Notons qu’en dépit de son scénario léger menant à un braquage en temps de guerre, le film offre une ribambelle de scènes d’action, notamment motorisées, entre chars allemands et alliés. A ce titre, même si De l’or pour les braves ne s’affiche pas clairement dans la catégorie du film de guerre, il collectionne tout de même les scènes spectaculaires de cet acabit.
Difficile de comparer ce film avec les productions de son époque. Mais difficile aussi de comparer De l’or pour les braves avec des films contemporains. En effet, si Brian G. Hutton est parvenu à faire de son film un grand succès du film de guerre, du film d’aventure et de la comédie, le tout en une seule fois, difficile d’imaginer un tel investissement à l’heure d’aujourd’hui, là où les sous-genre cinématographiques sont rudement compartimentés. Certes, le film n’est jamais moqueur ou malhonnête envers les soldats s’étant battus en Europe, mais gageons que la liberté d’expression propre au Seventies aura encouragé ce type d’entreprise, racoleuse mais diablement efficace. La preuve en est de l’implication de Clint Eastwood, pourtant symbole d’une Amérique virile qui ne rigole jamais avec son histoire. Un film culte à classer parmi les siens. A découvrir sans faute si par mégarde celui-ci vous a échappé. 15/20