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inspecteur morvandieu
39 abonnés
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3,5
Publiée le 30 novembre 2023
Le film de Robert Bresson, adaptation d'une oeuvre de Diderot, est l'histoire d'une vengeance amoureuse, de celles assez courantes d'une certaine époque littéraire. Le film, quant à lui, n'est pas commun. Bresson renouvelle, voire invente, la tragédie cinématographique. Dès les premières scènes, la gravité du ton et la sécheresse de la mise en scène tranchent avec les mélodrames sentimentaux courants. Et les dialogues de Cocteau ne sont pas étrangers à cette singularité. Parce qu'il s'est détaché d'elle, Hélène prétend se venger de son amant Jean en lui présentant Agnès, une jeune fille vivant avec sa mère. Le sujet est très simple et, débarassé de tout artifice mélodramatique, confine à l'épure. Le dépouillement de la mise en scène et ses ellipses élégantes, le laconisme des personnages, font que Bresson nous conduit à l'essentiel, à savoir la souffrance amoureuse commune aux trois protagonistes principaux: Hélène, toujours éprise de son ancien amant, Jean, éperdu d'amour pour agnès, elle-même prête à lui céder si elle ne s'en estimait pas indigne, conséquence de son passé que Jean ignore. Tragique et, consécutivement, intemporel, ce drame très formel, aux dialogues précis et inspirés, permet à chacun des interprètes de dévoiler, malgré son caractère uniforme, toute la sensibilité, la gravité de son personnage.
Mauvaise langue que j’étais, j’avais annoncé un automne pluvieux de suite après avoir vu son « Pickpocket » à la direction d’acteurs radicale, assumée mais non faite pour moi. C’est suite à ce film, « Les Dames du Bois de Boulogne », que Bresson s’est juré de ne prendre que des acteurs non-professionnels qu’il modèlerait à sa façon. Il était tellement déçu de ce film et de l’interprétation de Maria Casarès… Euh qui ? Maria Casarès, une des plus grandes actrices de son temps, qui est entrée plus tard à la Comédie-Française, excusez du peu ; qui a eu le prix d’interprétation pour son rôle « La chartreuse de Parme », excusez du peu.
Qui ? Maria Casarès, une femme de théâtre, une comédienne dans le sens noble du terme. Une passionnée des planches. Ben apparemment, une très bonne comédienne des planches ne fait pas nécessairement une bonne actrice de cinéma… selon Robert Bresson. Elle n’a pas su se conformer à sa direction d’acteurs. Ça arrive.
Très bien, j’arrête d’ironiser sur la philosophie cinématographique de Robert Bresson. D’autant que j’ai apprécié son film « Les Dames du Bois de Boulogne », eh oui ! Cette deuxième expérience est heureuse, même si elle ne correspond pas à la chronologie de Bresson.
Je n’ai rien à redire sur l’interprétation de Maria Casarès, moi ! Je perçois bien les intentions de Bresson dans l’expression figurative de l’actrice. J’ai bien aimé cette interprétation. Si elle peut paraître monolithique, elle semble traduire les consignes de son metteur en scène, insatisfait. Il la voulait plus expressive que bavarde. Son phrasé peut surprendre mais il s’accorde bien avec son esprit manipulatrice. Quant à Paul Bernard, son interprétation traduit parfaitement son personnage de bellâtre, manipulé et étonnement naïf. Dans ce récit sombre, j’ai apprécié le sourire d’Elina Labourdette avec ses longues jambes de danseuse. Dès qu’elle ne danse plus, elle ne sourit plus. Bresson n'abuse pas des bons moments ! Casarès sourit plus longuement qu'Elina Labourdette, mais d’un sourire carnassier.
Dommage que Bresson rejette son film. Moi, je ne le rejette pas. De la lumière au cadre, de l’interprétation au récit, j’ai tout apprécié. « Les Dames du Bois de Boulogne » est une éclaircie dans mon automne que je craignais pluvieux. Décidément, Bresson et moi ne sommes pas faits pour nous comprendre. A la prochaine expérience.
La vengeance est une femme ! Adaptant librement Diderot, Robert Bresson signe un drame sentimental cruel et machiavélique, servi par les dialogues de Cocteau et l’interprétation glaçante de Maria Caseres. En revanche, Jean Marchat qui joue le séducteur est nettement moins convaincant et charismatique. 3,25
Un film noir, assez expressionniste. Les actrices sont excellentes. Par contre l acteur lui. a autant de charisme qu une huître. On aimera les dialogues littéraires mais pas verbeux. Par contre la fin est ridicule. Il apprend qu il a épousé une prostituée et il n en a cure. Or cet acteur, qui avait visiblement peu de talent n a pas réussi à nous transporter durant tout le film vers cette passion, sa folie amoureuse,qui expliquerait pourquoi il s en fiche d apprendre le passé de sa dulcinée. Bref un bon film avec une fin mièvre.
D’après Diderot avec des dialogues de Cocteau. Réalisé sous l’Occupation. La vengeance d’une femme délaissée. La mise en scène et les éclairages soignés, la direction d’acteurs expressionniste créent une atmosphère particulière. Du beau travail.
« Les Dames du bois de Boulogne » est une version moderne adaptée librement d’un chapitre de « Jacques le fataliste » de Diderot. Robert Bresson écrivit un scénario qui résume les travers des riches aristocrates au besoin de paraître d’une bourgeoise à travers Mme. D, la mère. Ainsi, en gommant en grande partie analyse et critique sociale de l’original, l’essentiel est concentré sur une vengeance féminine, plus près de la superficialité d’un certain cinéma hollywoodien que du siècle des lumières. Même si le cinéaste renia totalement ce film qu’il jugea « très mauvais » il répond néanmoins au style voulu par le cinéaste : dialogues peu percutants mais qui renferment la finesse souvent masquée de Cocteau, jeu des acteurs totalement inspiré du théâtre moderne : figé et minimaliste à l’exception de Maria Caseres dont le jeu hautain, grandiose et statufié agaça le cinéaste qui jura, après moult disputes avec la star, que l’on ne l’y prendrait plus et se tourna vers des acteurs amateurs. Malgré une photographie une fois de plus remarquable de Philippe Agostini, le film n’échappe pas à la pesanteur statique du théâtre filmé. Résumer Diderot à un drame amoureux filmé sans émotions ni empathie revient à une pur exercice de style, ici grandement raté. Ni cinéma, ni théâtre, ni critique sociale, ni émotion, Bresson avait bien raison de détester ce résultat, près d’un roman photo à l’eau de rose, perturbé par la fatigante musique bouche-trou de Jean-Jacques Grünenwald pourtant si inspiré précédemment pour « Les anges du péché ».
Ce film de Robert Bresson « première période » laisse un goût d’inachevé, et a mal vieilli. Son principal intérêt réside finalement dans l’intrigue magnifique due à Diderot : il s’agit d’une s’agit de l’adaptation d’un épisode du roman « Jacques le fataliste ». (Cette intrigue ayant d’ailleurs été reprise plus brillamment par Emmanuel Mouret dans « Mademoiselle de Joncquières »). Le style adopte déjà ce qui sera la marque du réalisateur, par un certain minimalisme dans l’ambiance et les décors, et le refus du spectaculaire ; mais le jeu trop théâtral des acteurs, des temps morts pesants et certaines concessions, comme une musique envahissante, nuisent au propos. Il en reste néanmoins une impression de tragédie, noire, comme le symbolise ce mariage qui ressemble à un enterrement, et une très belle dernière scène, où l’amour l’emporte de façon inattendue, tant sur la bienséance que sur les calculs et les machinations.
Adapté de Jacques le Fataliste de Diderot et dialogué par Cocteau, le film décrit la jalousie manipulatrice et destructive d’une femme délaissée. Chef-d’œuvre par la maîtrise toujours infaillible de Robert Bresson et par l’interprétation des deux héroïnes , le film – peu supérieur au remake d’Emmanuel Mouret, Mademoiselle de Jonquières, le film garde tout de même un goût suranné. Moins par la qualité photographique — il a été tourné à la fin de l’Occupation – que par la psychologie qu’il véhicule qui semble réellement d’un autre temps. À voir pour sa valeur culturelle et le délicieux entrain d’Élina Labourdette, moins pour l’émotion qu’il peut procurer.
Film plat, très plat. L'adaptation aurait pu être une réussite mais on voit bien que les acteurs n'y croient pas. Ils récitent leur texte sans aucune conviction.
Le style est austère et naturaliste mais aussi ascétique et théâtral. Finalement le tout paraît un peu statique, voir ennuyeux s'il n'y avait pas quelques plans magnifiques et s'il n'y avait pas les magnifiques dialogues de Cocteau. Le plus gros défaut du film repose sur un mauvais choix de casting, à savoir l'acteur Paul Bernard dont le charisme est inexistant, le jeu inexpressif, à tel point qu'on se demande en quoi deux femmes belles et intelligentes ont-elles pu trouver de séduisant chez lui ?! Précisons que Bresson a affirmé qu'il détestait ce film. Loin de mériter ce désaveu, son film reste riche sur bien des points, il manque juste un minimum de souffle pour nous emporter pleinement. Site : Selenie
Transposition d’un segment de Jacques le Fataliste signé Diderot dans un Paris atemporel, quasi éternel, Les Dames du Bois de Boulogne relit la désillusion amoureuse à l’aune de la modernité urbaine des années 40 curieusement mise en suspens, trace par le mouvement – ou plutôt le refus du mouvement – du contexte politique dans lequel l’œuvre a vu le jour. Robert Bresson se saisit du noir et blanc comme d’une esthétique où se cristallisent ces espoirs perdus, ces amours blessés : il place la couleur au service d’un espace vidé de sa naïveté et de son droit à la vie dans ce qu’elle a de plus sensible et pure. Car les protagonistes semblent autant perdus dans l’intimité de leur demeure qu’à l’extérieur, et la contemplation d’une cascade dans un bois rappelle aussitôt le jaillissement impossible d’une existence, réduite à sa seule valeur d’ornement décoratif. Les visages et les corps ne sont plus que des façades ; en eux bat un profond ressentiment à l’égard d’un temps dans lequel ils ne se sentent pas évoluer et sont enfermés. Derrière cette vengeance de classe se cache un cœur qui se meurt, ce même cœur qui cède dans la robe de mariée, lorsqu’arrive la clausule. Tragédie cynique, Les Dames du Bois de Boulogne prouve que le constat dressé par le philosophe des Lumières quelques siècles plus tôt reste actuel : mener à bien une entreprise de réparation de son honneur pour n’éprouver, une fois celle-ci achevée, sa solitude que plus profondément encore. Car l’amour impossible entre Agnès et Jean dessine en creux la passion interdite par le poids des familles et des classes sociales, l’atrophie du désir que font régner étiquettes et cérémonials. Le film incarne avec une grande subtilité la terreur d’une époque à l’idée de reconstruire du lien humain dans un monde désuni et vulnérable.
On aurait pas pu trouver mieux que Maria Casares avec son regard profond qui voit au-delà des choses. Comme un regard d’anticipation. Et il y a cette froideur élégante et esthétique qui caractérise en cette œuvre sur la manipulation et la vengeance. Bresson c’est comme un livre ouvert, une évidence. Une grande classe dans le style
La déception est grande mais elle ne se fait pas attendre tant "Les dames du bois de Boulogne" est un film insipide. Si l'ouverture intrigue avec cette réplique ("Il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour") qui laisse entrevoir une réflexion sur la cruauté et les faux-semblants, la suite ne possède que peu d'intérêt. Le film s'applique surtout à dérouler son petit programme (une femme manipule son amant sans que celui-ci ne s'en rende compte) et à faire évoluer des personnages inconsistants dans des lieux interchangeables, symptôme de la faiblesse de l’écriture et de l’académisme d'une mise en scène qui accorde aussi peu d'importance au décor qu'aux acteurs. Jamais l’œil n'est sollicité parce qu'aucun plan ne se dégage de l'ensemble, parce que Bresson n'a aucune volonté de faire des scènes et de créer des situations : c'est peu dire que le film est transparent et qu'il traite son idée d'une façon particulièrement convenue. Aussitôt vu, aussitôt oublié !
Quelque soit l’admiration que j’ai pour Bresson, pour son style épuré et son indépendance totale de cinéaste, il ne m’est pas possible de m’éclater devant son film comme je l’ai fait devant celui de Mouret. Le mélodrame populaire convient bien mieux à l’esprit de Diderot (évidemment pas à son style parfois austère) que le tragique de Bresson. Ici les invraisemblances du récit ne ressortent pas au dépend de l’attachement porté aux personnages. La sécheresse de ton de ce film est terriblement frustrante et ne permet pas de ressentir dans nos fauteuils un minimum d’émotion. C’est beau l’intellectualisme mais quand il s’agit de l’amour passion avec la jalousie ou la vengeance comme corolaires, c’est inadapté. J’ajouterai que sorti de son contexte du dix-huitième siècle, ces évènements n’ont plus guère de sens. Il ne reste quasiment que la mise en scène et Maria Casarès. Les dames du bois de Boulogne ne sont qu'un exercice de style.
Ce qui frappe en premier lieu dans ce film tourné durant l’Occupation allemande, c’est la prédominance du noir dans les tenues vestimentaires. A l’exception d’Agnès (Elina Labourdette), tous les personnages sont vêtus de noir. Dans Les dames du bois de Boulogne, la couleur du deuil symbolise la fin des espoirs de chacun des protagonistes “endeuillés�. Même le mariage dument célébré fait visuellement penser à un enterrement. Fait rare, ce film de Robert Bresson est le réceptacle de jeux d’acteurs. Ainsi, voit-on par exemple Maria Casarès interpréter le personnage d’Hélène et lui attribuer des airs assez mystérieux. Alors que Jean Cocteau est l’auteur des dialogues on ne peut s’empêcher de tirer des liens entre Les dames du bois de Boulogne et La belle et la bête (1946). Ainsi, Cocteau saura notamment s'inspirer de la dernière séquence du premier pour composer un très célèbre plan du second.