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soniadidierkmurgia
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4,0
Publiée le 22 mars 2014
La filmographie de Fassbinder est foisonnante (44 films en 15 ans de carrière) et donc forcément inégale mais ne laisse jamais indifférent. "Maman Küsters s'en va au ciel" est une dénonciation féroce de l'Allemagne post soixante-huitarde qui se laisse honteusement aspirer par le capitalisme triomphant comme elle s'était enivrée jadis aux chants funestes de la geste hitlérienne. Emma Küsters et son mari vivent avec leur fils et sa femme sous le même toit pendant que leur fille aînée Corinna (Ingrid Caven) avide de gloire tente sa chance comme chanteuse dans les cabarets de Francfort. Le père vient de se suicider à l'usine après avoir tué son contremaître. A partir de ce fait divers tragique dont l'annonce parvient à Maman Küsters par la radio, Fassbinder va passer au crible les réactions de tous les corps constitués de la société qui peuvent avoir intérêt à la récupération de ce geste dont personne n'aura jamais la véritable explication. Des médias féroces qui utilisent sans vergogne la docilité de Maman Küsters qui espère réhabiliter l'image de son défunt mari, aux partis politiques qui tentent de surfer sur l'image d'Epinal d'un héros en rébellion contre le système, en passant par la cellule familiale qui explose par la révélation de l'égoïsme ou de la faiblesse des deux enfants, rien ne vient au secours de maman Küsters pour l'aider à faire dignement son deuil. Le constat est amer et sans aucune concession, encore renforcé par l'attitude de maman Küsters dont la droiture n'est jamais remise en cause par Fassbinder. Le titre évocateur montre bien que dans l'esprit du cinéaste, continuer à se tenir droit dans une société qui se délite mérite une ascension directe auprès des instances divines. On a souvent dénoncé l'absence d'esthétisme du cinéma de Fassbinder en complet décalage avec l'emphase picturale d'un Werner Herzog alors coqueluche de la critique mondiale. Mais le dépouillement des décors de la plupart de ses films qui répondait à la volonté du réalisateur de tourner vite et beaucoup, sans doute en pressentiment de la brièveté de sa carrière, agit souvent comme un amplificateur des drames humains qu'il nous propose. Ce qui n'empêche pas Fassbinder de montrer à plusieurs reprises sa virtuosité technique comme dans sa manière de filmer la très belle Ingrid Caven qui fut un temps son épouse. La formidable Brigitte Mira, actrice récurrente et quasi exclusive de Fassbinder, illumine de son regard clair, tout d'abord perdu puis ensuite déterminé ce long chemin de croix qui remettra en cause tous les fondements d'une existence. L'extrême gauche se sentant trahie par Fassbinder ne lui pardonnera pas la fin du film où en manipulation ultime de Maman Küsters, cette dernière sera associée à un acte terroriste. Certainement un des films les plus désillusionnés du grand réalisateur allemand.
"Querelle" n'en était pas une. Il fallait, je crois, simplement se laisser happer par cette atmosphère hyper sexuelle et hyper chatoyante. Je n'y étais pas arrivé. C'est quoi cette fameuse une dont je parle ? Tout simplement la déception. Et, je viens de connaître la première devant un film du grand Rainer Werner Fassbinder. Dans son ensemble, la descente aux enfers de cette vieille dame, fraîchement veuve, ne m'a pas beaucoup intéressé. Je sais pas, j'ai comme eu l'impression que Fassbinder passait à côté de son sujet. Moi, je m'attendais à un truc intense, un truc qui fait mal. Un truc où il allait mettre son personnage au supplice. Comme il le fera l'année d'après dans la puissante "Roulette chinoise". J'ai trouvé ça finalement assez plat. Que la souffrance de Maman Küsters ne ressortait qu'assez faiblement. Je les vois bien les intentions : pointer du doigt les ravages que peuvent faire les articles de la presse à scandale. En ce sens, on peut aisément dire que Fassbinder a pris les taureaux par les cornes et s'est emparé du problème avant bien du monde. Mais ça ne prend que très moyennement. Quant à la dénonciation du capitalisme, du monopole comme c'est dit dans le film, d'accord, le propos est juste et puis, d'une certaine façon, ça fait penser à "La chinoise" de Godard, puisque tous ces soi-disant défenseurs des droits des travailleurs et qui lancent des appels pour le grand changement, ne sont que des révoltés d'opérette. Mais, je trouve que ça ne colle pas avec ce qui intéresse la vieille Küsters. On pourra toujours dire que c'est comme une preuve plus que concrète du jusqu'au-boutisme qui l'anime, c'est qui est vrai, mais je trouve que ça ne colle pas. Ça fait comme une rupture de ton avec ce qu'on a vu avant. Et puis, il y a quand même pas mal de longueurs. Le film a clairement ses défauts, à mes yeux, ce sont ceux que je viens d'exposer. Mais, il ne faut pas en oublier les qualités. Il y a toujours des qualités à retirer d'un Fassbinder, toujours. Son film est lent, froid et n'aide aucunement à réhabiliter un peu la nature humaine, ce n'était pas le style de la maison. Dans certaines séquences, même si elle ne saute pas aux yeux, il y a une manipulation parfois insoutenable. Insoutenable de par le fait que ces journalistes de feuilles de choux s'abreuvent dans la tristesse de cette veuve et de sa naïveté. Tout comme le feront les deux adhérents du parti communiste allemand. Et puis, encore plus que la mort de la vieille qui nous est racontée, mais pas montrée, il y a quelque chose de profondément dramatique que de la voir lâchée par ses mômes qui se foutent pas mal de ses problèmes alors qu'elle leur a certainement tout sacrifié et de voir qu'à son âge avancé, elle ne connaît en fait rien à la vie, elle ne connaît rien de la nature humaine. D'un seul coup d'un seul, la bulle dans laquelle elle vivait depuis plus de 40 piges éclate. Mais bon, il n'empêche que ce "Maman Küsters s'en va au ciel" (titre magnifique au passage) n'a pas la puissance qu'il devrait avoir.
Chef d'oeuvre du cinéma de Rainer Werner Fassbinder, Maman Küsters s'en va au Ciel montre à quel point l'opinion publique est fragile et jusqu'où peut aller un groupuscule pour parvenir à ses fins. Ce film brillant est avant tout un brûlot qui n'épargne ni la société capitaliste de la RFA des années 70, ni les communistes, ni les anarchistes. Fassbinder s'engage en insistant sur le caractère faible et façonnable du personnage éponyme au film, qui agit tout du long telle une girouette, dans le seul et unique espoir de blanchir la réputation de son mari défunt. Ce long métrage est réellement poignant voire parfois même effrayant : le portrait de cette famille allemande moyenne qui s'effondre peu à peu fait froid dans le dos. Ainsi Maman Küsters, délaissée par ses enfants, n'aura que pour unique soutien le parti communiste, parti qui profitera de ses faiblesses morales. Un très beau film, avec un dénouement surprenant : Maman Küsters s'en va au Ciel est à ranger sur l'étagère des oeuvres majeures de Fassbinder...
Un très bon Fassbinder, minimaliste, languissant. Maman Künster est palpable, crédible, dans cette lenteur, cette âpreté totale qui colle au film. On souffre pour cette vieille femme, si digne, simple et sincère, qui se met en tête de "réparer" l'image de son époux, salie suite à un acte désespéré. Sa douleur n'aura d'égale que sa naïveté: manipulée, abandonnée par les siens, et trahie. RWF utilise des clichés pour servir l'histoire: ici, les communistes ne sont que de beaux parleurs, les anars des révoltés clairement inconscients. Une vision bien déprimante de la défense prolétarienne, récupérée par les médias, par le spectacle, comme par les politiques. Le film est "non-finito", non achevé (on arrêtera de critiquer le manque de moyens), et cela lui donne encore plus de force. Mur noir: malaise glaçant.
Le sujet est intéressant car, d’une part, ancré dans les années 70 (« Les années de plomb » marquées par la violence politique des mouvements extrémistes) et toujours d’actualité sur la solitude et l’égoïsme : Emma Küsters (Brigitte MIRA, dont c’est la 4e, sur 8, collaboration avec Fassbinder) dont le mari Herman s’est suicidé après avoir tué le fils de son patron qui dirigeait une usine de produits chimiques, aux prises avec la presse à sensations [ce qui rappelle « L’honneur perdu de Katarina Blum » (1975) de Volker Schlöndorff et Margarethe Von Trotta], tente de réhabiliter son mari. Elle rencontre d’abord un couple de journalistes communistes, Marianne et Karl Thälmann [Margit CARSTENSEN dont c’est la 2e collaboration, sur 5, avec le cinéaste et Karlheinz BÖHM dont c’est la 3e collaboration avec le réalisateur et qui s’était fait connaitre du grand public dans le rôle de l’empereur François-Joseph, dans les 3 « Sissi » (1955, 1956 et 1957) d’Ernst Marischka] avant de tourner dans « Le voyeur » (1960) de Michael Powell et « Les quatre cavaliers de l’apocalypse » (1962) de Vincente Minnelli] qui se servent d’elle et parlent beaucoup sans vraiment agir ; d’où son rapprochement, en désespoir de cause, avec un militant gauchiste anarchiste (et dont Fassbinder se sent probablement proche) qui causera sa perte lors d’une prise d’otages dans un journal. Malgré sa longueur (2h), l’abondance de scènes en plans fixes et une fin décrite car non filmée (manque de moyens ?), le réalisateur montre bien la manipulation de Mme Küsters et le chacun pour soi de son entourage :spoiler: son fils, monteur de prises électriques avec sa femme, part en vacances en Finlande et sa fille, Corinna (Ingrid CAVEN, ancienne épouse de Fassbinder de 1970 à 1972, d’où sa participation dans 18 de ses films et téléfilms), chanteuse de cabaret, tente de faire parler d’elle dans les journaux à travers les malheurs de sa mère.
Les fables politiques sont toutes ratées au cinéma, au théâtre ou dans les livres. Toutes sauf certaines pièces de Brecht et un film : Maman Küsters s'en va au Ciel de Fassbinder (1975). Pour illustrer la colère de la classe ouvrière, l'égoïsme, la trahison des staliniens et l'infantilisme des anarchistes-individualistes, il fallait tout l'art de ce scénariste, dialoguiste, directeur d'acteur génial. Le tout est filmé très rapidement mais comme toujours avec subtilité et tact. La fin "américaine" est plus belle que la fin théorique jamais tournée. Et surtout, la troupe emporte tout le film avec conviction car Fassbinder, comme Bergman ou Cassavetes, est un de ces grands artistes de troupe : ils réussissent à rassembler autour d'eux l'équivalent des troupes de Shakespeare, Molière, Marivaux ou Brecht. Et dans notre cas : quelle troupe étincelante ! Personne n'en fait trop, tout le monde est juste, pas un de ces immenses acteurs ne se met en avant et tous contribuent à la rectitude de l'oeuvre que voulait Fassbinder. L'immense Brigitte Mira (qui est l’impressionnante Emmi de Tous les autres l'appellent Ali 1974) est la tragique Mère Courage du film dont le vieux et calme mari Küsters s'est suicidé après avoir tué le directeur du personnel de son usine. Corinna, sa fille égoïste, chanteuse de cabaret, est incarnée sans l'ombre d'un effet théâtral, par la sublime vraie chanteuse Ingrid Caven. Margit Cartesen au sommet de sa beauté et de son calme, qui fut Petra Von Kant, est là une épouse communiste, plus ou moins attendrie par Maman Küsters. Son mari, leader un mini-parti allemand, est joué par l'impérial (et beau) Karlheinz Böhm, le fameux empereur François Joseph de tous les Sissi (impérial, justement). On rencontre le très convaincant Gottfried John en journaliste pourri : rappelez-vous de son physique taillé à la hache de méchant russe des James Bond ; il est aussi de Hoffman du grand feuilleton Berlin Alexanderpltaz 1980 (où Brigitte Mira joue Mme Bast : à revoir absolument). Cette troupe incroyable contribue à la réussite de ce film difficile et tendu, sans temps mort, l'un des quelques 15 chefs d'oeuvre de Fassbinder, le plus grand cinéaste allemand, mort à 37 ans en 1982 après 25 films de cinéma influencés par Sirk, Brecht et Rohmer, autant de mise en scènes de théâtre et de films de télévision.
Cinéma et terrorisme, c’est les deux pôles moteurs de l’OEuvre cinématographique de R.W.Fassbinder. En 1975, le cinéaste décide d’expliciter son propos et de réaliser «Mutter Küsters fahrt zum Himmel» (RFA, 1975). Dirigeant encore Brigitte Mira, une de ses actrices fétiches, Fassbinder met en scène un nouveau traitement de son thème de prédilection : les réprouvés de la société. Le personnage de Mira, l’éponyme Maman Küsters, apprend le suicide de son mari et l’assassinat du patron par son même mari. Ainsi se désagrège la famille ou du moins s’ouvre les fissures qui la parcouraient déjà. Fassbinder expose la lente descente aux enfers de la mère. Rien de diabolique dans la descente, comme à l’accoutumé du cinéma fassbinderien, le tout découle d’un naturel presque blasé. C’est l’endoctrinement politique des partis et l’inculpation calomnieuse des journaux qui pervertiront le personnage initialement naïf de la mère. Le message politique est virulent, le film condamne les «lavages de cerveaux» politiciens et la dépravation qu’engendrent les journaux à scandale. Pas de doute, on est bien dans le cinéma de Fassbinder. Or que reste-t-il là de la plastique granuleuse, de l’ impureté de son esthétique ? Si fondamentalement, le film incorpore totalement la cohésion du cinéma de Fassbinder, formellement on peut se sentir dépaysé. C’est l’habitude de Fassbinder que d’instiller un style nouveau à chacune de ses œuvres, et c’est véritablement louable comme pour Dreyer. Mais l’aspect lisse qui caractérise «Mutter Küsters…» n’aide pas un décalage escarpé mais semble davantage produire du classicisme. Et quand on connaît l’admiration de Fassbinder pour Douglas Sirk et l’analogie qui semble lier le film avec les films de Sirk, on ne peut que constater le choix esthétique du film comme choix classique. Voyez «Das Liebe ist kalter als der Tod» (RFA, 1969), un des premier Fassbinder puis celui-ci est le fossé formel est saisissant.
C'est un fond politique que Fassbinder donne cette fois à son oeuvre. Elle est toujours du même genre répudié par les uns et loué par les autres comme un art, mais en faisant du paysage politique un élément central. Et c'est derrière la saleté graphique que se cachent les perles au niveau du texte, son intérêt reste donc intact.
Enfin une rétrospective Fassbinder a Paris! C'est génial et ce serait dommage de la laisser passer car c'est rare! Il faut absolument découvrir ou redécouvrir les œuvres de ce cinéaste allemand ,d' une modernité et d' une humanité remarquables! "maman Kuster s'en va au ciel " nous raconte les conséquences du suicide d'un ouvrier pour sa famille et en particulier pour sa femme. Le travaille de la presse a scandale qui récupère ce fait divers et détruit la réputation d' un homme et de sa famille,mais aussi la récupération politique et l'embrigadement de cette femme seule et désespérée pour servir leur cause. Le film est pessimiste: immoralité de la presse,individualisme forcené voir égoïsme des êtres,délitement de la famille, régression sociale, crise économique, règne de la loi du plus fort et du paraitre,désillusion devant les idéaux politiques( communistes,anarchistes)et leur impuissance, désespoir ,solitude ... Bref ce film est d' une modernité implacable dans son constat social, et l'analyse des êtres humains et de la société est d' une finesse et d' une justesse implacable ! Fassbinder nous tend un miroir sans faux semblant et c'est visionnaire. A voir absolument ,comme ses autres films !
Un film d'un réalisme psychologique fin et sans scrupules, assez pessimiste et mélancolique. J'ai vu les deux fins différentes proposées par le réalisateur, et elles montrent une hésitation entre le parti pris du tragique et le choix du comique et d'une "happy end" surfaite et un peu ridicule... Le film balance entre ces deux pôles à plusieurs reprises. L'actrice principale, que j'avais déjà vu dans "Tous les hommes s'appellent Ali", remplit une fois de plus avec brio son rôle de femme délaissée et discréditée.
Un bon Fassbinder. Une peinture implacable du cynisme qui sous-tend les rapports humains. Un scenario inventif et étonnant, avec de bons rebondissements. Une plongée dans l'univers kitsch et coloré de l'allemagne des 70's. Mais que demander de plus ??
Un film très original qui fustige autant la cruauté de nos sociétés "capitalistes" que le cynisme et l'opportunisme dont font preuve les mouvements politiques qui se disent "antisystème" (à l'époque où le film a été réalisé, l'extrême-gauche marxisante)