Petit rappel du pitch : une jeune demoiselle de compagnie employée par l'insupportable Mrs Van Hopper fait la connaissance du riche Maxim de Winter, veuf depuis que sa femme s'est noyée l'année passée. Contre toutes les attentes de la jeune femme, Maxim lui demande de l'épouser. C'est ainsi qu'elle entre dans la vie de Manderley, la demeure familiale des de Winter, ce qui n'est du goût de tout le monde, et surtout pas de Mrs Danvers, l'intendante.
J'ai été très étonnée de voir que certaines scènes qui n'avaient pas besoin d'être changées (notamment celle de la rencontre, au tout début de l'histoire) l'ont été quand d'autres passages sont respectés à la virgule près par rapport au roman. Globalement, la fidélité au livre est bien respectée (ce qui peut étonner vu la fidélité douteuse d'autres adaptations datant de la même époque, je pense à Pride and Prejudice et à Wuthering Heights, avec Laurence Olivier également, mais dans le cas de Rebecca cela s'explique peut-être par le fait que l'auteure du roman, Daphne Du Maurier, était bien vivante), sauf à la fin. J'avoue avoir beaucoup de mal à comprendre pourquoi la grande révélation de l'histoire a été modifiée, surtout qu'au final on en vient au même. Bon, dommage. De la même manière, la deuxième moitié est rapidement zappée (quasiment rien de la scène du bal) et on perd un peu l'héroïne de vue à un moment, alors qu'elle est présente dans tout le roman puisqu'elle en est la narratrice.
On retrouve dans ce film la réalisation propre à Hitchcock, avec la musique au moment qui va bien, les gros plans sur les visages (fameuse scène de la fenêtre!), les jeux de lumière... J'ai trouvé que le duo Olivier-Fontaine fonctionnait bien pour ce couple que j'apprécie, mais chéri qui a regardé avec moi a trouvé que le jeu de Joan Fontaine était un peu trop exagéré. C'est un très fréquent du cinéma de l'époque, mais en même temps ce n'est pas choquant sur les autres acteurs, et l'excès de jeu sied mal dans les drames. Je n'ai pas trouvé ça trop choquant. Par contre, Joan Fontaine est quand même vachement jolie pour une créature décrite comme assez quelconque dans le roman, mais comme c'est elle qui raconte, il est bien possible qu'elle se monte la tête dans le livre pour rien du tout. J'ai bien aimé Laurence Olivier dans ce film. Mrs Danvers fout bien les jetons, incarnée par Judith Anderson. On a également bien envie de cogner sur Favell, c'est donc qu'il est bien incarné ! Je n'imaginais pas du tout Frank Crawley comme l'acteur en lisant le roman, mais sa personnalité est la même, et je l'aime bien.
Il existe une certaine tension dans le film, mais je la trouve mieux rendue par les mots du roman que par images. En même temps, dans un film en noir et blanc, on ne voit pas grand-chose lors des scènes de nuit, ce qui n'aide pas. Là où j'ai vraiment été gênée, c'est que Manderley ressemble plus à un château moyenâgeux vaguement restauré pour être habité qu'à une véritable demeure anglaise. Il y a un mélange des époques qui ne m'a pas plu du tout. Cela se retrouve aussi dans les vêtements et les coiffures, qui correspondaient mal à l'époque selon moi. Il ne me semble pas que Daphne Du Maurier place son histoire dans le temps, mais moi je la vois clairement avant la Première Guerre. Dans le film, les domestiques paraissaient décalés. L'ensemble m'est apparu ni cohérent, ni plausible. C'est le gros point noir que je retiendrai de cette adaptation. Quant à chéri, il a trouvé que c'était loin des meilleurs films d'Hitchcock (je peux difficilement juger, n'en ayant vu que deux !).
Je suis curieuse de voir Jamaica Inn, une autre adaptation d'Hitchcock de l'un des romans de Daphne Du Maurier. Malheureusement, je ne me souviens plus très bien du roman, mais je l'avais beaucoup aimé. En tout cas, ce film est le dernier qu'Hitchcock a fait en Grande-Bretagne avant de s'installer aux États-Unis, peut-être que ça me plaira davantage, même si j'en doute vu que l'histoire a l'air d'être pas mal changée.