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Raw Moon Show
139 abonnés
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3,5
Publiée le 28 décembre 2014
De la passion au jeu amoureux, du jeu amoureux à la cruauté, de la cruauté à la perversion puis fatalement à l'irréparable... Il n'y a souvent qu'un pas que le couple Michel Deville / Patricia Highmith franchit allègrement sur un île de cauchemar qui n'a de prometteur que les apparences. Le traitement distancié du film, le jeu épuré des acteurs, tout ici convient parfaitement à épouser cette fable qui nous dit que l'amour n'est souvent (dès lors qu'elle est mal comprise) qu'affaire de propriété, d'amour propre et de blessure narcissique... Mais dès lors que l'irresponsabilité des parents s'en mêle (alors qu'un enfant devient le spectateur obligé de ces déchirements adultes), alors le pire reste encore à venir...
Michel Deville est un cinéaste inclassable, naviguant entre le classicisme des anciens (il a été pendant dix ans l’assistant d’Henri Decoin) et les réalisateurs de la Nouvelle Vague de la même génération que lui. Son cinéma tout en finesse et relativement éclectique malgré un goût marqué pour le marivaudage est souvent comparé à celui d’Eric Rohmer, une des figures majeures de la Nouvelle Vague. Au mitan de sa carrière alors qu’il est un cinéaste reconnu, il remet en chantier une adaptation précédemment abandonnée d’un roman de Patricia Highsmith, la reine du thriller psychologique à partir d’un travail de Christopher Frank qu’il remanie en compagnie de Florence Delay. Daniel Toscan du Plantier le producteur souffle à Deville le nom d’Isabelle Huppert sa compagne de l’époque et Jean-Louis Trintignant remplace Jacques Dutronc initialement prévu pour le rôle de l’époux du couple infernal qui hante ce film à l’atmosphère irrespirable. Deville lui-même affirme que ce qui l'a intéressé au premier chef dans le roman d'Highsmith c'est l'histoire d'amour. Une histoire d'amour très perverse qui sème les cadavres derrière elle. On peut comprendre Deville tant l'intrigue assez simple est soutenue ou relancée par la montée crescendo des rapports venimeux entre ces deux êtres dont on se demande comment ils ont pu en arriver là, laissant leur fille unique spectatrice inquiète de leur manège pseudo érotique où la domination de la jeune épouse sur son mari plus âgé tient lieu de seul mode opératoire de la montée du désir . Le style très épuré et distancié voire glacial de Deville convient à merveille à cette sarabande mortifère assez peu crédible du point de vue formel qui exhale un parfum étouffant de tubéreuse nous faisant pousser un ouf de soulagement arrivée au générique final. Certains êtres ne devraient jamais se rencontrer, chacun trouvant chez l'autre le détonateur de ses pulsions morbides refoulées. C'est ce qui est arrivé à ce couple amené pour survivre à se jouer des autres sans aucune entrave morale. Jean-Louis Trintignant et Isabelle Huppert constituaient le couple d'acteurs idéal pour incarner une telle dérive qui conduit un amour devenu malade à engendrer un monstre qui échappe à ses géniteurs. Peu de mots sont échangés pour laisser le champ libre à ces regards qui en disent long sur ce que chacun attend de l'autre. Deville, ses acteurs, sa musique et sa caméra diffusent un poison lent qui magnifie une auteure qui n'aura pas eu à se plaindre de l’adaptation cinématographique de ses œuvres. Alfred Hitchcock ("L'inconnu du Nord Express",1951), René Clément ("Plein soleil", 1960), Claude Miller ("Dites lui que je l'aime", 1977), Wim Wenders ("L'ami américain",1977), Claude Chabrol ("Le cri du hibou",1987) et ici Michel Deville ayant su avec maestria retranscrire sur pellicule la perversité sulfureuse qui s'empare des âmes dans les romans de Patricia Highsmith.
L'histoire d'un couple "libre", seulement à force le mari devient jaloux et en arrive au(x) meurtre(s) des amants de sa femme. Sur ce thème simple, Deville a réalisé un chef d'oeuvre de psychologie et une réalisation tout en nuance et subtilité. Très grande maîtrise du langage cinématographique, le style est parfait tant du point de vue de la mise en scène que de la direction d'acteurs. Les deux comédiens principaux sont excellents. Le récit progresse sous forme d'un thriller, car on se doute que tout ça va mal se terminer. Le plus remarquable est la réalisation, rythme, plan, séquences, musique, mouvements de caméra, tout est presque parfait. La fin même est surprenante, même si tout ça n'est pas très moral...
Un des plus grands films de Michel Deville, l'orfèvre du cinéma français. Folle inventivité de la mise en scène, brio de l'interprétation, ambiguïté permanente d'une intrigue à la fois trouble et ludique : tout l'art du cinéaste semble condensé ici dans ce faux-polar où les personnages s'ouvrent sur leur propre abîme pour notre plus grand plaisir. Rarement l'opacité du sentiment amoureux, sa lumineuse irrationalité mais aussi sa violence latente n'aura été aussi brillamment traité. Le mystère du film, élégant et frondeur, libère pour longtemps notre imaginaire. Bien après la projection.
Victor crée des parfums à Jersey, et incite sa femme Mélanie à flirter avec de jeunes hommes. Il pimente ce jeu pervers de la sentence : quand quelqu’un me déplait vraiment, je le tue. Mais prétendre qu’on est un meurtrier peut conduire à le devenir… Tiré d’un roman éponyme de Patricia Highsmith (deep water), ce huis-clos est centré sur les rapports du couple Huppert – Trintignant, tous deux excellents. Une sorte de « glissement progressif du plaisir », dans lequel chacun cherche à humilier et faire souffrir l’autre sans cesse davantage, et dans lequel ils restent complices malgré les apparences. A partir de cet intéressant canevas, Deville brosse à petites touches le portrait des protagonistes, avec légèreté, en s’appuyant sur des dialogues intelligents, souvent à double sens (il ne va pas tarder à refaire surface), et sur une musique omniprésente et obsessionnelle (concerto pour clavecin de De Falla). Il en résulte un met pour gourmet, qu’il faut déguster par petite bouchées, en portant à chacune toute son attention.