C'est tellement talentueux qu'il est difficile d'en exprimer les contours. Pourquoi Laura m'a plu comme tant d'autres? Parce qu'incontestablement le film d'Otto Preminger s'approche de la perfection du genre.
C'est d'abord un scénario typiquement du genre noir, même un modèle de perfection. Le meurtre d'une femme magnifique, dont on imagine l'aura pendant les quelques flash backs, une mondaine majestueuse, modèle de beauté, d'intelligence, de désir. Deux suspects, un vieil homme (Clifton Webb) qu'il prend Laura sous son aile, un vieil homme intelligent mais égocentrique, parfois touchant ou arrogant, sage et inquiétant; et un amant, jeune, dynamique, entreprenant et d'air sympathique mais qui se révèle confus voir menteur, manipulateur (Vincent Price). Une enquête menée par un inspecteur sombre et mystérieux (Dana Andrews), viril et magnifique, de plus en plus impliqué intimement dans l'affaire.
Il est difficile de parler du film sans en dévoiler des éléments capitaux qui gâcheraient l'expérience. Laura, c'est à la fois un lent et long glissement d'ambiance, où le premier recul des personnages devient rapports intimes, où les sentiments de désirs et de jalousies prennent de l'ampleur, mais aussi pleins d'inattendus, de rebondissements, et peut-être est-ce de la naïveté, mais on arrive jamais à saisir le coupable idéal, on suspecte tour à tour chaque protagonistes, avec l'ilussion de nos fausses certitudes.
La photographie, récompensée par un Oscar, est sublime, comme la lumière. Le thème musical de l'oeuvre souligne parfaitement l'ambiance régnante. Mais plus encore, les acteurs se démarquent tous : Dana Andrews, en enquêteur "à l'ancienne", élégant et et viril; Clifton Webb en intellectuel inquiétant, fascinant et repoussant; Vincent Price, la gueule du gendre idéal trop propre sur lui qui irrite; et surtout Gene Tierney, magnifique dans son rôle Laura, au regard foudroyant et aux contours de visage si doux. Son rôle de femme désirable n'aurait pû être mieux interprété.
Il m'est difficile après d'en dire plus, coincée entre les éléments qu'il ne faut pas réveler et la perfection d'un film presque inaccessible. Si ce n'est pour vour dire de vous y embarquer au plus vite.