Suite à un sondage concernant les héros que le public aimerait voir revenir à l’écran (publié à l’occasion de la sortie de Jamais plus jamais), il est apparu évident que les spectateurs voulaient en masse retrouver Harry Callahan au cinéma. C’est ainsi grâce à un sondage que l’on doit le retour de Clint Eastwood dans son rôle fétiche.
Mais cette fois, il ne se contente pas d’interpréter le film mais également de le réaliser. Avec Eastwood derrière la caméra, il n’est donc pas étonnant d’assister à l’aventure où l'ambiguïté est la plus importante. En effet, cet épisode (qui est une réécriture d’un scénario ne contenant pas à la base l’inspecteur Harry et qui était uniquement adressé à Sondra Locke) possède une morale très trouble où la frontière entre le bien et le mal n’est plus clairement définie.
Ainsi, pour la seule fois de ses aventures cinématographiques, Harry Callahan (tout comme le spectateur) éprouvera de la compréhension pour la responsable de la série de meurtres sur lesquels il enquête (elle se venge du viol resté impuni qu’un groupe a fait subir à elle et sa sœur, devenue suite à cela totalement mutique) et ira même jusqu’à la relâcher.De même, il crée une narration un peu différente en laissant une plus grande place à à la psychologie de ce personnage de vengeresse (qui marque la dernière apparition de Sondra Locke dans le cinéma d’Eastwood) en nous faisant rentrer dans ses pensées par l’intermédiaire de flashbacks.
Eastwood s’amuse à brouiller les pistes tout au long du film. Ainsi, si dans les précédents films, c’était Harry qui courait après les criminels, c’est lui qui est désormais pourchassé aussi
: il a causé la crise cardiaque (plus besoin de.44 Magnum, des menaces suffisent) d’un chef mafieux et les hommes de celui-ci cherchent à le venger
. Harry semble ainsi pouvoir mourir à tout instant
(il est même présenté, après avoir été laissé pour mort comme une espèce d’ange de la vengeance dans un plan en contre-jour, réutilisant la thématique de L’Homme des hautes plaines et que l’on retrouvera peu après dans Pale Rider, Le Cavalier solitaire)
. C’est aussi en se référant aux précédents épisodes qu’Eastwood brouille les pistes.
Il s’amuse à présenter le personnage interprété par Albert Popwell comme un homme voulant tuer Harry alors qu’il est en fait un ami de l’inspecteur : le réalisateur se joue du spectateur se souvenant que Popwell a joué des criminels (à chaque fois, des rôles différents) dans les précédents volets.
De même, il s’amuse à créer le trouble chez le spectateur en donnant le nom de Briggs (comme le lieutenant se révélant être un traître dans Magnum Force) et non plus de McKay au capitaine joué par Bradford Dillman.
Malgré une esthétique différente (nous sommes passés des années 70 aux années 80), une atmosphère plus psychologique et trouble et un Clint Eastwood plus marqué par les années, le film n’oublie pas pour autant les scènes d’action
offrant même une des plus célèbres avec celle du braquage de la cafétéria avec les célèbres répliques "Smith, Wesson and me" ("Smith, Wesson et moi" en V.F.) et surtout "Go ahead ! Make my day !" ("Vas-y ! Allez ! Fais-moi plaisir !")
. Pour ce qui est de l’ambiance musicale, suite au décès de Jerry Fielding, Lalo Schifrin est de retour à la baguette et offre une bande originale accentuant l’atmosphère trouble de l’ensemble et, à l’image de beaucoup de film des années 80, possédant une chanson (qui peut un faire penser à un James Bond) à la fin.
Grâce à tous ces éléments, Le Retour de l’inspecteur Harry (plus connu sous son titre original : Sudden Impact) se révèle être une des meilleurs aventures du célèbre policier de San Francisco (ici expatrié suite aux multiples dégâts causées par sa justice expéditive). Dès l’année suivante, Eastwood persistera dans la veine du polar trouble avec l’excellent film officiellement non réalisé par lui : La Corde raide.