Sans doute l'un des plus grands films de gangsters français et, incontestablement, l'une des plus grandes dates de notre cinéma puisque "Borsalino" est, avant tout, l'affrontement entre Alain Delon et Jean-Paul Belmondo, soit les deux plus grosses stars de l'époque (et accessoirement de deux de nos plus grands acteurs), au sommet de leur forme et de leur charme. Il s'agit du principal atout du film et c'est peu de dire que le public en a pour son argent puisque les deux monstres sacrés sont de tous les plans et s'en donne à cœur joie dans des rôles particulièrement bien écrits et collant parfaitement à leur image. D'un côté, le flamboyant François Capella (Belmondo), charmeur et chaleureux, qui entend profiter de la vie quitte à se bruler les doigts. De l'autre, le ténébreux Roch Siffredi (Delon), plus mystérieux et ambitieux mais surtout tout en intériorité. Les prestations des deux stars sont un véritable plaisir jouissif, décuplé à chaque fois qu'ils se retrouvent ensemble à l'écran (tantôt adversaires, tantôt complices). Parmi les scènes d’anthologie, on retiendra, bien évidemment, la première rencontre musclée entre Capella et Siffredi mais aussi la négociations des coups (avec le fameux coup de la pièce truquée) ou encore le terrible final. A ce titre, la dernière scène du film est un grand moment de tragédie particulièrement bouleversante. Mais "Borsalino" ne se limite pas à ce seul plaisir coupable et a su magnifier la rencontre au sommet en offrant aux deux stars un terrain de jeu exceptionnel. Quelle intrigue aurait été plus indiqué que cette ascension, dans le milieu marseillais des années 30, de deux petits truands rivaux qui vont s'associer pour devenir les Rois de Marseille. La reconstitution de l'ambiance de l'époque est un véritable tour de force (on voit que la production a bénéficié d'un confortable budget) et la réalisation de Jacques Deray, bien qu'aillant un peu vieilli (le rythme est parfois un peu lent, les mouvements de caméra sont un peu voyants...), réussit à magnifier l'intrigue grâce à des plans superbes, des dialogues formidables et une musique devenue légendaire. Et puis, la force des films de cette époque est de pouvoir compter sur la classe des costumes trois pièces et des chapeaux des personnages. Enfin, "Borsalino" peut s'appuyer sur des solides seconds rôles qui, une fois n'est pas coutume, ne sont pas étouffés par l'aura des deux stars. On retrouve, ainsi, l'ambigu Michel Bouquet, le méchant Arnoldo Foa, l'amusant Julien Guiomar, la toute jeune Nicole Calfan, le détestable Christian de Tilliere ainsi qu'une Catherine Rouvel un peu potiche. "Borsalino" est donc une merveille qui aura du mal à être égalé tant l'aura de ces 2 monstres sacrés à l'époque n'a plus d'équivalent aujourd'hui.