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weihnachtsmann
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4,0
Publiée le 17 février 2015
C'est un style qui n'est pas du tout dépassé. On film encore comme ça de nos jours chez certains cinéastes actuels. Bien sûr le sujet est assez dur, voire déprimant mais il y a une recherche du cadrage, des gros plans lourds de sens, les silences qui en disent plus long que les dialogues. La misère est aussi dans la mise en scène. C'est réussi je trouve.
Un cinéaste inconnu, à part des cinéphiles très avertis ; une œuvre réduite, 12 films courts métrages compris ; aucune œuvre marquante, mort dans l’anonymat à 57 ans en 1991 ; mais un auteur reconnu post mortem qui fait parler de lui depuis quelques années : Bill Douglas. Rien de tel pour titiller mon âme de baroudeur cinéphile. Son fait de gloire est sa trilogie autobiographique tournée entre 1972 et 1978 et composée de 2 moyens pour finir par un long court ; 3 films pour 2h45 d’images chocs. Jamie a 8 ans en 1944, la guerre en est à sa fin. Mal fagoté, sale ; il vit dans une cité minière britannique; une rue triste, une maison délabrée au confort inexistant, il subit la malnutrition et vit avec une grand-mère aimante… Ca ressemble à du Dickens déjà ; mais ce n’est pas fini : sa mère à l’hôpital psychiatrique, son père vit dans le même village mais ne l’a pas reconnu et son frère a un autre père… Jamie vit comme un petit sauvage entouré d’adultes défaillants et confrontés dès son plus jeune âge à la misère matérielle, mais pire encore à la misère affective… une enfance gâchée bien visible dans les yeux résignés de ce jeune garçon. Pas de sourire sur son visage mais pas de larmes non plus ; à quoi bon, la misère, il n’a connu que çà ; la plainte connait pas, il n’a que peu conscience de son sort. Et le bonheur, il ne le voie que très peu autour de lui ; la première scène nous donne à voir des mineurs remontant du fond et accueilli par leurs enfants heureux… mis à part çà, rien durant 45’. Donc le petit bonhomme va chercher et trouver ce besoin d’affection auprès d’un prisonnier allemand jouant le rôle de père par substitution qui donnera un des plus beaux « je t’aime… Helmut » du cinéma. De belles scènes autour de ces enfants laissés à eux-mêmes, il y en a d’autres. Autant protecteur de leur grand-mère que leur grand-mère d’eux, la scène où Jamie réchauffe les mains de sa grand-mère avec une tasse est magnifique. De plus le film est quasiment muet ; au point qu’il fait une belle transition entre le muet par son noir et blanc (voir noir et gris) et le parlant par le traitement social si britannique de la misère. Un des films les plus bruts sur l’enfance humiliée et laissée pour compte. Et pour interpréter les deux personnages principaux, les deux jeunes demi-frère, ce sont deux non professionnels qui s’y collent ; deux jeunes comédiens en herbe au destin peu enviable à l’image de leur personnage. Budget dérisoire pour ce film, mais véritable volonté artistique aussi, Douglas ne faisait que trois prises maximum afin de cerner au mieux les moments de vérité et de sincérité. Et puis à l’image par souci d’économie de moyen, il utilise des ellipses sèches et des plans fixes contemplatifs. Un film injustement méconnu qui donne envie de voir les deux autres opus de la trilogie.
Pas de psychologie, pas vraiment de fil narratif, presque pas de dialogues mais des acteurs magnifiques et un sens prodigieux du cadrage : cela suffit pour faire de 'My Childhood' un coup de maître à la précision quasi-documentaire mais à l'épure presque abstraite.