Une des sommités dans les années 70 pour un genre pas facile à traiter. L’Inspecteur Harry est vraiment une pointure.
Coté casting je n’ai rien à redire. Eastwood est mémorable, livrant une prestation de flic certes expéditif mais pas non plus totalement en dehors des lois (il n’est pas l’Exécuteur version Bronson qui dézingue des voleurs de carambars !). Charismatique, certes rugueux mais finalement assez attachant et humain, il joue tout en finesse et je pense qu’il a un réel attachement pour son rôle l’ayant repris de surcroit à plusieurs reprises. Face à lui Andrew Robinson est un méchant brillant. Car certes c’est bien lorsque le gentil est talentueux, mais le méchant est quand même essentiel, et là, quel taré ! Robinson réussit l’exploit d’être un psychopathe totalement déjanté et en même temps terriblement réaliste et crédible. Il ne surjoue jamais, et en plus il faut reconnaitre qu’il a la parfaite tête pour ce genre de rôle ! Le reste est moins essentiel, le film reposant beaucoup sur la confrontation ce des deux personnages, mais les seconds rôles tiennent tout à fait la route et ne peinent pas à convaincre eux non plus.
Au niveau du scénario l’Inspecteur Harry est excellent là aussi. Le rythme est parfait, le film ne lâchant pas le morceau du début à la fin et sans temps mort. L’histoire est prenante, la traque offre un suspens alerte et efficace, il y a des moments d’émotion réelle aussi, et de manière général le film s’avère à la fois un divertissement toujours frais pour son âge, mais en plus il est plus subtil que ce que l’on a longtemps voulu voir dans cette saga. Il soulève beaucoup de questions intéressantes, et dégage souvent une sorte de noirceur mélancolique qui je pense correspond fort bien à l’état d’esprit des policiers, même encore aujourd’hui.
La mise en scène de Siegel est lumineuse. Rien que la première scène (celle qui m’avait le plus marqué il y a fort longtemps !) pose son homme, avec une séquence de « snipe » des plus réussies. Il y a de vrais morceaux d’anthologies, et je relève surtout un travail sur les angles de vue brillant et intelligent. La photographie a certes vieilli, mais finalement elle correspond bien à l’ambiance des années 70. Un grand usage des teintes bruns-gris qui se retrouvent beaucoup dans de nombreux polars de l’époque, contrastant avec un ciel bleu et une lumière légèrement écrasante, et entrecoupés de morceaux nocturnes. Ces derniers sont un peu sombres, mais peut-être cela vient-il aussi de l’ancienneté du film. Quant aux décors ils donnent une excellente ambiance urbaine avec une plongée dans les bas-fonds des plus agréables. Les scènes d’action sont simples mais très efficaces. Siegel, et pas que lui d’ailleurs mais toute l’équipe ont su les rendre mémorables et pour certaines légendaires. Les répliques qui tuent d’Harry, la mise en scène parfaite de Siegel notamment dans la première scène, la violence graphique parfaitement dosée, tout cela contribue, malgré une réelle sobriété et des moyens limités à faire de l’Inspecteur Harry une des pépites du genre. Enfin, la bande son signée Lalo Schiffrin est vraiment un élément traité à part entière, et ca fait du bien.
En conclusion j’avais de lointain souvenir de l’Inspecteur Harry, et je me le suis remémoré récemment avec un réel plaisir. Il reste pour ma part une indéniable référence des années 70, et appartient aux rares films de cette époque qui n’ont pas vieilli d’un pouce. Tout est d’une étonnante modernité. Je lui mets 5 sans aucune restriction, et j’ai hâte de me plonger ou replonger dans ses suites.