« Après l’homme à l’imperméable » Duvivier adapte à nouveau un roman de James Hadley Chase. Damned, encore raté ! Longtemps et injustement, Hollywood fut accusé d’avoir détruit Duvivier. C’est archi faux car dans sa deuxième période française il réalisa trois grands films, « Panique », « La fête à Henriette et « Voici le temps des assassins » et de très honorables comédies avec les deux Don Camillo et « Pot Bouille ». Mais c’est au milieu des années cinquante que la nouvelle vague attaqua Duvivier le présentant comme le symbole d’un cinéma dépassé. Il suffit de lire la revue « Cahiers du cinéma » de cette époque pour découvrir ce procès en sorcellerie. Déboussolé, le grand cinéaste en vint à douter de son talent et s’entoura de collaborateurs médiocres et d’acteurs hasardeux. Ainsi, le très surestimé Barjavel se retrouve au scénario et surtout aux dialogues, où contrairement à Jeanson (qui collabora à de nombreux films de Duvivier) aucune réplique ne fait mouche ou apporte la moindre subtilité, le tout restant à un premier degré au ras des pâquerettes. Voulant faire jeune, le réalisateur confie les rôles principaux à Robert Hossein, Jean Sorel et Catherine Rouvel. Le premier, en accord avec les dialogues, n’apporte pas une once de distanciation, excepté dans son énorme rire à la fin du film (l’une des rares bonnes scènes) et Catherine Rouvel qui même si elle apporte une présence évidente (et sexy) manque de nuance et d’épaisseur dans le rôle de la garce malfaisante. Si Georges Wilson est parfait dans le rôle de l’imbécile heureux, comme Jean Sorel dans celui du salaud à face d’ange, ils ne sont que des deuxièmes rôles, Dans ces conditions et en déroulant une histoire de manière prévisible, il n’est pas étonnant qu’une une espèce de torpeur envahisse alors peu à peu le spectateur, seulement réveillé par le surprenant beau frère dégénéré et son fils du même métal. C’est trop peu. Dans la même veine, « Le facteur sonne toujours deux fois » apporte une comparaison cinglante quant au défaut de qualité de « Chair de poule » qui devient la preuve tangible que le matraquage d’une certaine critique a fini par faire perdre ses repères au grand cinéaste qui, quelques années plus tôt, nous aurait gratifié d’une descente infernale dans la noirceur de la nature humaine. C’est d’autant plus regrettable, que contrairement à leur tête de turc, à part peut-être Godard et Truffaut, aucun d’entre eux ne marquera l’histoire du cinéma comme le fit Duvivier.