Le film est un enchantement car le réalisateur a su créer son propre univers qui ne ressemble à aucun autre. Rien à voir avec les contes de Grimm, de Perrault ou d’Andersen. Le thème du voyage onirique ou intérieur, se rapproche plus du livre « Les aventures d’Alice au pays des Merveilles » (1865) de Lewis Carroll (1832-1898) (adapté, notamment, par les studios Disney en 1951) ou du film « Le magicien d’Oz » (1939) [adapté du livre (1900) de Lyman Frank Baum (1856-1919)] de Victor Flemming (1889-1949) mais en plus imaginatif voire surréaliste. La présence de dieux et de transformations (
magnifique pour celle de Haku en dragon blanc
) évoque aussi « Les métamorphoses » (1) d’Ovide (43 avant notre ère, 18 après). L’histoire est imprévisible, sans manichéisme, ni mièvrerie, et empreinte des thèmes chers à Miyazaki : personnage féminin, d’abord boudeur et peureuse, qui s’émancipe, sans ses parents [comme dans « Kiki et la petite sorcière » (1989)], faisant preuve de courage, de solidarité, d’empathie et touchée par l’amour, importance de la nature et des traditions. L’univers du palais des bains est d’une grande richesse avec sa vieille directrice Yubaba, protégeant de l’extérieur son gros bébé Bō, Kamagi, vieil homme aux 6 bras, chargé du fonctionnement de la chaudière (ambiance steampunk) et aidé par les boules de suies dites noiraudes [présentes dans « Mon voisin Totoro » (1988) où il est aussi question de déménagement], ses grenouilles, l’esprit putride, gardien d’une rivière polluée, et le sans-visage, créateur de pépites d’or, oiseaux en papier, etc. Sans oublier la musique de Joe HISAICHI (dont c’est la 7e collaboration sur 10 avec le réalisateur). Pas étonnant que le film ait fait un carton au Japon (24 millions d’entrées) et ailleurs (1,4 million d’entrées en France) et ait obtenu une quinzaine de récompenses internationales dont l’Ours d’or du meilleur film à la 52e Berlinale (présidée par la réalisatrice et productrice indienne Mira Nair), ex-aequo avec « Bloody Sunday » (2002) de Paul Greengrass, et l’Oscar 2003 du meilleur film d’animation.