J’aurai bien aimé, mais je ne peux pas affirmer que j’ai passé un superbe moment à regarder « Le voyage de Chihiro », mon baptême de feu avec la signature Hayao Miyazaki, que j’imaginais beaucoup plus passionnant que ça. J’ai effectivement beaucoup aimé le style, c’est à dire l’univers proposé, la musique, les caractères, la patte du dessinateur, le côté artistique est d’une qualité indébiable. Il y a beaucoup d’originalité et de créativité dans l’élaboration des personnages, des plus déplaisants aux plus attachants, des plus fascinants aux plus dégoûtants, il n’y en n’a pas un qui nous laisse indifférent, qui ne nous intrigue pas. De ce point de vue là, le contrat est bien rempli, cet univers est sans doute fascinant, enfin, pour ceux qui disposent d’un estomac assez solide face à pas mal de scènes à connotation répugnante (je tiens à prévenir quand même). La héroïne Chihiro par exemple, la Alice japonaise du Pays des Merveilles, possède à coup sûr une personnalité des plus captivantes, courageuse inattendue, qui défie ses peurs et tient obstinément à ses principes, elle est un exemple de dévouement, de prise d’initiative et de sacrifices. Par contre pour ce qui est de l’intrigue, ça me laisse un sentiment très mitigé. La quête de Chihiro, et les révélations autour de sa rencontre avec Haku ne m’ont rien inspiré, pas plus que les quelques symboliques intéressantes mais bien trop abstraites pour que ça nous laisse dubitatif. On voit bien qu’il y a une critique de la société de consommation, que ce soit par rapport aux cochons ou au sans-visage, on comprends bien qu’une allusion allégorique y est faite, on constate aussi une objection par rapport au système capitaliste avec la ruée immodérée vers le gain au-delà de toute éthique, la production effreinée pour des besoins superflus et enfin l’impuissance face aux tentations du plaisir, des défauts que seule Chihiro arrive à remettre en question, mais tout cela n’est pas assez abouti, pas assez construit pour nous convaincre. Son voyage, ses rencontres, les interactions entre personnages relèvent du coup plus du fait divers que d’une analyse intéressante sur l’état de la société, au sein d’un scénario que j’ai trouvé quelque peu décousu et pauvre en enseignements. Je reste clairement sur ma faim vis à vis de cette oeuvre déroutante, un train qui ne mène nulle part pour moi, je ne vois que trop vaguement où Hayao Miyazaki veut en venir.