Cette réunion de deux monstres sacrés est assurément un rendez-vous manqué. Si on les avait principalement croisés auparavant ensemble dans « La Traversée de Paris » et « Le Gentleman d’Epsom », Jean Gabin et Louis de Funès ne jouaient pas encore dans la même cour. En 1968, ce sont deux vedettes consacrées et on pouvait espérer de leur confrontation un bijou. Seulement voilà, Jean Gabin et Louis de Funès n’évoluaient pas avec les mêmes camarades de jeu et si leur réunion était un formidable « coup » commercial, il ne pouvait que difficilement se transformer en pépite du septième art.
Le résultat du film est à l’image de son développement, à savoir totalement bancal. Pour que les deux vedettes acceptent de tourner ensemble, il a fallu accéder à leurs désirs, ce qui amena le réalisateur à débuter le tournage de son film alors que le scénario initial proposé par Alphonse Boudard avait été rejeté avant d’être repris par Pascal Jardin. Le film, même si on trouve ici ou là quelques habitués de la bande à de Funès, est en outre mené par l’équipe du moment de Jean Gabin. Pour ne rien arranger, les deux acteurs ont été en froid tout au long du tournage pour diverses raisons, ce qui compliqua la tâche de tous. Soyons donc lucides, le film n’est pas aussi catastrophique qu’il aurait pu l’être dans ces conditions. Et il le doit, bien sûr, à son couple vedette. Si Jean Gabin cabotine parfois un poil trop, il est cependant un original tout à fait convaincant. De son côté, même s’il n’est pas dans son univers, Louis de Funès a réussi à intégrer ce sens du comique qui n’appartient qu’à lui (mimiques, répliques).
Bien sûr, le scénario ne suit pas : si le début du film est rondement mené, la dernière partie, extrêmement faible, ne sait clairement pas où aller. L’ensemble est rempli d’incohérences, les enjeux sont insaisissables et on perd le fil d’une histoire qui semblait pourtant riche à exploiter. Mais le gâchis n’est pas total et l’ensemble n’est pas aussi mauvais qu’on peut d’abord le penser. On retient ainsi quelques numéros du duo, ce qui vaut déjà bien mieux que la majorité des comédies qu’on nous sert aujourd’hui.