Un film à part pour un réalisateur à part qui signe avec Yoyo un superbe film sur le cirque en multipliant les idées. Il rappelle à quel point le cinéma d’hier pouvait se montrer inventif avec trois fois rien. Yoyo est une réussite d’interprétation pour commencer. Etaix, par ailleurs clown, comédien, gagman, est parfaitement à l’aise dans un double rôle taillé sur mesure pour lui. Il se fond presque, d’une certaine manière, dans sa propre vie, celle d’un clown touche-à-tout et un peu fou au succès jamais démenti ! Il est à la fois drôle, touchant, poétique, burlesque, et rend hommage avec habileté à ses inspirateurs, notamment Chaplin. Autour de lui d’excellents interprètes, en particulier Luce Klein et William Coryn avec lesquels il forme un touchant trio dans la partie centrale du film.
Le scénario est très simple et très efficace. Il raconte la jeunesse et l’ascension d’un clown qui se trouvera, un jour, confronté à un choix. C’est une histoire simple mais racontée avec beaucoup de poésie, de douceur, d’humour, et d’ailleurs, à chaque fois qu’on croit que le métrage va s’essoufler, pouf, un gag sorti de nulle part vient relever immédiatement l’affaire. Hommage au monde du cirque, c’est plaisant de voir un film qui a une approche légère et drôle du cirque à l’ancienne, souvent plus dans l’esprit d’un Rémi sans famille ! Le tout, il faut le préciser, quasiment entièrement en muet, un tour de force payant car ça plonge encore davantage dans l’ambiance.
Formellement, c’est superbe. Les décors sont grandioses, notamment le château, superbe, en particulier lorsqu’il est décrépi. L’ambiance du cirque est bien là, il y a des tas d’idées de mise en scène brillantes (la caméra subjective par exemple), un sens de la mise en scène du gag particulièrement affuté et énormément de narration visuelle. Le film est une réussite, avec en sus beaucoup de figuration, de beaux costumes, et une bande son très présente et variée qui accompagne à merveille le film. A noter aussi l’humour sur les bruitages qui finissent de faire de ce film un indispensable de sa génération.
A mon sens, Pierre Etaix signe là un des grands films de sa génération, un film qui emploie à peu près tout ce qui était déjà désuet dans les années 60 pour faire un film quasiment d’avant-garde ! Brillant. 5