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Caine78
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3,0
Publiée le 6 juin 2020
Sur une intrigue plutôt originale, qui aurait aussi bien pu donner un drame qu'une comédie, « Le Dernier sou » s'approche nettement plus du premier, offrant quelques très jolis moments, prenant soin des différents personnages, aussi bien « positifs » que négatifs, tous ayant une part d'ombre tout en sachant évoluer au fil du récit, certes de façon parfois un peu prévisible, mais suffisamment crédible pour que cela ne soit pas gênant. André Cayatte emballe ça convenablement, dans un noir et blanc soigné (jolie restauration, au passage!), aidé dans son entreprise par une interprétation de qualité, la belle Ginette Leclerc et le toujours excellent Noël Roquevert en tête, de très loin le second rôle le plus intéressant. Bref, si l'on pourra peut-être regretter un dénouement un peu abrupt, reste un assez bon film, parfois un peu facile, parfois plus complexe, mais globalement d'assez bonne tenue.
Dernier film de la Continental, "Le dernier sou" réalisé en 1943 devra attendre 1946 pour sortir sur les écrans, certains de ces acteurs et Cayatte lui-même étant en délicatesse à la Libération. André Cayatte dont la carrière décolle vraiment à partir des années cinquante avec "Nous sommes tous des assassins" premier d'une longue série de films "sociétaux", démontre avec cette histoire pittoresque d'escroquerie qu'il pouvait à l'occasion se laisser aller à un peu de légèreté. Noël Roquevert dont Cayatte appréciait le talent si particulier montre qu'il pouvait lui aussi occuper les premiers rôles. Ginette Leclerc, Gilbert Gil et Charpin complètent avec bonheur cette peinture d'un Paris grouillant où la TSF était reine et où la candeur du petite peuple permettait à des aigrefins sans scrupule de lui faire prendre des vessies pour des lanternes. On sourit souvent devant cette pochade malgré tout peu réaliste mais au parfum nostalgique fort sympathique.
Présenté comme le dernier film produit par les fonds allemands de la Continental pendant l'Occupation, cela fait déjà une raison de regarder le film de Cayatte. Une deuxième est qu'il est aussi le dernier film de l'estimable et si sympathique Charpin (dans un rôle très secondaire). C'est anecdotique, comme l'est le film. "Le dernier sou" est une petite intrigue vaguement sentimentale autour du personnage ambivalent de Ginette Leclerc, un sujet pas très bien construit qui penche vers le mélo. Noël Roquevert -tiré à quatre épingles dans un emploi sérieux et sobre qui n'est pas si fréquent dans sa filmographie- est le patron escroc d'une agence qui s'est spécialisée dans l'arnaque aux petites annonces dont sont victimes de modestes français. Le scénario et les personnages manquent visiblement d'épaisseur; Cayatte, comme empruntant trop de pistes, n'approfondit ni l'un ni les autres. Son film n'a même pas la qualité de refléter l'esprit vichyste, sauf à considérer qu'il stigmatise un mauvais Français, qui fait souvent l'intérêt du cinéma particulier de l'Occupation.