1er film sur un sujet si sensible et rare. Adaptation d’un livre de Cornec, lui-même tiré d’une histoire vraie (déjà) et malheureusement trop prophétique par la suite.
Force est d’avouer que l’histoire est très bonne, bien racontée. On voit les changements de mentalités des jeunes et les malheurs des ragots de villages. Comme dans « les assassins de l’ordre » plus tard (toujours avec Brel) et dans le procès Outreau, on constate les limites de la justice, un leitmotiv intéressant chez Cayatte. Malheureusement on remarque tout autant qu’on ne tire pas de leçons de cela… Cependant, je suis étonné, même pour l’époque, qu’on soit
emprisonné sans jugement et que le postulat « innocent jusqu’à ce qu’on prouve qu’il est coupable » ne semble pas exister
.
Contrairement à d’autres j’ai apprécié « l’enquête » du maire au début, ça permet de démarrer fort et de poser les personnages comme l’intrigue. Du coup, on ne s’ennuie pas en introduction pompeuse et on assiste aux 2 points de vue, ça fait partie de ping pong, ça change. Dans le même genre, la 1ère partie à charge contre le prof et la 2ème où ça rétro pédale passe bien, ça équilibre ; tout comme les profits des « victimes » en opposition au désespoir grandissant de l’accusé Les motivations des 3 filles sont diverses mais font vraies, là encore c’est bien trouvé. Notons que la psychologie des personnages est très poussée. Perso j’ai adoré la preuve de Brel, ça prouve l’importance du détail et de la réflexion tout en montrant l’inefficacité de la police. Par contre la fin est trop abrupte à mon goût, on aurait dit le final d’un vaudeville. J’aurais aimé voir la suite, les conséquences, les répercussions sur le prof, les élèves, les parents et le village.
Au niveau du jeu c’est sobre et fluctuant, là aussi le style fait vieux. Riva s’en sort bien, on voit son humanité et ses doutes qui la culpabilisent. Concernant Brel, hormis l’étrangeté de le retrouver en prof après sa chanson Rosa, il est plutôt bon, très naturel surtout, on a l’impression de retrouver le grand Jacques chanteur, il ne joue pas vraiment il est naturel, il laisse transparaitre sa personnalité. Vous me direz que vu le rôle c’est une bonne chose, et je suis d’accord, mais ça ne « fait » pas acteur du coup, sans doute parce que c’est son 1er film. Sinon le rythme est un peu lent et mou mais on dénote peu de longueurs. La trame est assez connue maintenant, devenant prévisible à force que l’on aborde ce sujet, mais en ce temps c’était original. Pas vraiment de musique, ça renforce le côté huis clos et dépouillé. Le son est bizarre, ça et le montage sobre donnent un côté « passé » à l’ensemble, un peu film d’auteur aussi. Au final c’est une très belle œuvre, qui mériterait d’être plus connue. Pouvoir constater la puissance des mots, que ce soit par la rumeur ou ceux qui amènent la culpabilité, est appréciable et trop rare. Montrer ce que les gens sont prêts à faire pour la morale bien pensante l’est tout autant.