La corruption, minuscule virus pernicieux, s'aventure où bon lui semble, n'hésitant pas à passer les portes des commissariats, s'immisçant dans les uniformes, infectant les belles plaques scintillantes, poussant le vice jusqu'aux abords d'institutions plus vastes. Toute la clique est gangrénée. Du simple flic en uniforme au maire grassouillet de la ville, pas un pour rattraper l'autre sauf, tiens donc, l'homme aux moustaches anarchiques, le type à la dégaine clocho-décontractée, Serpico, celui par qui la Vertu s'embrase. Flic atypique et extrêmement doué, un poil grognon, bourreau des cœurs, Lumet nous dresse avec ferveur un portrait des plus passionnants, à grand renforts de plans rapprochés bouillonnants et de mimiques, Al Pacino, irréprochable. Messie d'une droiture presque oubliée, Serpico, ne s'ouvrant pratiquement jamais aux femmes qui lui sont dévouées, compliquera sa tâche en jouant la carte de l'être impénétrable un peu trop souvent. Machoires brisées, accès de folie grandioses, face à face terrifiants, jeux de regards avec la Mort, Serpico/Lumet repoussent à maintes reprises les frontières, les franchissant sans hésiter. Au diable la prudence, à mort la corruption, buvons à l'innocence, au retour de la Raison - Yeah Man, c'te délivrance, l'honnêteté réintègre la maison.