Certains trouveront sans doute que Un mauvais fils manque de rythme, et ils n’auront pas tort. Sautet filme sa chronique de façon assez lente, sans vraiment chercher à donner de la vigueur à son métrage, via une mise en scène appliquée mais très neutre, s’effaçant, à mon sens, de trop par rapport au sujet traité.
Cela étant, on tient ici un métrage intéressant, où le réalisateur aborde la dure réinsertion d’un délinquant, un drame familial, l’amour, sous des airs réalistes. C’est la force de ce métrage, d’être réaliste, et de traiter son sujet avec peu de fioriture. Parfois grave, parfois cocasse, Un mauvais fils brasse des thèmes universels, et le fait bien, avec un ancrage dans son époque lié à cette volonté d’authenticité recherchée par le réalisateur. Malgré son rythme inégal, il est difficile de vraiment décrocher devant ce métrage plein de sincérité, et subtil, même si certains rebondissements paraissent « faciles ». C’est un souci en effet, une brouille sérieuse s’efface en 5 minutes, un amour né encore plus vite de rapports houleux, pour ne pas dire glaciaux. Ça enlève une certaine crédibilité, et pourtant, les dialogues affutés, et surtout le jeu très bon des acteurs permettent de ne pas trop les ressentir. On pourra peut-être aussi trouver la partie sur la drogue trop ténue, mal dégrossie, même si elle impacte directement le déroulé du film.
Le casting est ce qui sauve assez nettement le métrage de Sautet. Car même s’il n’est pas inintéressant, il joue trop sur la finesse des échanges et la force des acteurs pour exister réellement sans eux. Patrick Dewaere trouve encore une fois un rôle rêche, difficile, et il le porte avec un enthousiasme certain et sa force coutumière. Charisme, présence forte et naturel marquant, il fait face à une Brigitte Fossey toute en délicatesse, et à un Yves Robert non moins rêche que son fils. Si les acteurs principaux sont tout à fait convaincants, je saluerai cependant la prestation très réussie de Jacques Dufilho, lequel campe peut-être le personnage le plus étrangement marquant du film.
Sur la forme, comme je l’ai dit Sautet s’efface de trop. Si l’ambiance réaliste est là, faisant d’ailleurs de ce métrage une tranche quasi-documentaire de la vie du début des années 80, je regrette que la mise en scène, autant que la bande son un peu terne et attendue, ne soient pas plus marquants. Par sa froideur, sa neutralité apparente, on peut penser à un Garde à vue par exemple, seulement ce qui pouvait convenir dans un face à face tendu en huis-clos peine un peu à s’appliquer ici, surtout de façon aussi constante. Bref, la neutralité pour saisir la vie, pourquoi pas, mais si l’on ne cherche pas à se démarquer du document, j’ai du mal à percevoir l’intérêt de faire de la fiction.
Malgré cette conclusion un peu dure, Un mauvais fils reste un métrage recommandable. Sans partager l’enthousiasme de certains pour ce métrage, je dois reconnaitre qu’entre les bons acteurs et l’authenticité du cadre, de l’ambiance, des épisodes montrés, il y a un intérêt à voir ce film. Dommage cependant que Sautet se montre trop discret dans sa réalisation, que le rythme soit un peu plat, et surtout qu’il y ait beaucoup de retournements trop brusques pour être pleinement crédibles. Dans un film aussi réaliste, c’est frustrant. 3