Je savais que Clint avait un goût prononcé pour la mortification, il suffit de revoir certains de ces westerns limites masochistes, et on comprendra le pourquoi de cette vision assez particulière qu’il a du musicien dont il tire le portrait. On ne peut pas douter de la qualité de l’objet, formellement il n’y a rien à dire, il n’a rien à prouver. Whitaker et Venora sont excellents, bien filmés, rien à dire. Par contre, le discours sous-jacent à du mal à passer. Bird est descendu, (c’est le cas de le dire) de son piédestal pour se limiter à un : junkie, alcoolique, dépressif, qui trompe sa femme, va de temps en temps en clinique, et puis quoi encore ? Ah oui, il entre parfois en studio pour faire un disque, (mais il n’arrive jamais à l’heure, ils sont toujours en retard, ces génies), et joue dans un club, au hasard, le soir. C’est quoi ça ? C’est le Be Bop ça ? On ne peut limiter Bird à sa caricature. Eastwood aime beaucoup le jazz, n’aime pas beaucoup le rock, (on le voit bien dans le film), et nous donne une vision de l’artiste maudit qui lui convient. Cela lui évite de rentrer dans le vif du sujet ; le talent de Bird semble tomber du ciel, il a besoin de drogue pour créer, transpire tout le temps comme un porc, comme c’est académique comme façon de voir. Forman avait fait la même chose avec Mozart, il l’a descendu de son socle, mais avec une réelle distance qui a sublimé le film, là, c’est le contraire.