En dépit de la réalisation Bessonienne à laquelle on peut reprocher une forme trop familiale, peu scrupuleuse de représenter avec réalisme la pratique sportive de l'apnée (et ce, malgré des parents instructeurs en plongée sous-marine), présentant quelques touches d'humours typiques décrédibilisant ponctuellement le film (le plongeur japonnais qui tombe dans les vappes par hyperventillation avant même de plonger, le petite voiture de Jacques Mayol), des facilités scénaristiques niveau sentimalisme (le décès du père d'Enzo, l'histoire d'amour ambigüe entre Enzo et la journaliste), Le Grand Bleu est une oeuvre aboutie sur plusieurs plans. D'abord, la musique, mise en force dès l'opening qui est réussie (le montre la scène d'Enzo jeune qui nourrit une muraine sous l'eau !), reste mémorable et par la zénitude intonée via la mélodie elle magnifie la mer, la propulsant au rang de temple sacré, et est donc une plus-value notoire pour chaque scène emblématique du film où elle est utilisée. BO : excellente. Ensuite, les interpètes respectifs de Jacques Mayol (personnage romancé de l'apnéiste de même nom) et Enzo Molinari (à mettre en parallèle avec l'apnéiste Enzo Maiorca), à savoir Jean Reno et Jean-Marc Barr, sont excellents. Et ce, dû au charisme de Jean Reno, qu'il est inutile d'argumenter tant il est connu de la culture populaire, et à l'interprétation de Jean Marc Barr, acteur efféminé et énergique dans la vie réelle qui parvient à camper avec brio un personnage reservé, simplet, au comportement quasi autistique tant il cherche à fuir la vie réelle en s'immergeant (dans tous les sens du terme) dans le monde de la mer, notamment via son amitié animale avec les dauphins. Le film met donc en avant une rivalité amicale entre les deux apnéistes pour qui la mer est sacrée, pour qui le désir de rester le plus longtemps en fusion avec elle - et sans bouteille d'air comprimé - est primordial. Le paroxysme de la romance réside dans la phrase de Barr lorsqu'il dit explicitement "il faut une bonne raison pour remonter", là où un vrai apnéiste professionnel vous dira que rien n'est plus faux car "lorsqu'on est au fond, on a qu'une envie : c'est de remonter pour y retourner". Il conviendra de comprendre que la fin n'est pas appréciée des apnéistes, lorsque Barr choisit le "suicide" en lâchant la gueuse, à on sait combien de mètres de profondeur, pour rejoindre son ami dauphin. Moi je l'ai adorée, elle m'a fait frissonné. Cette fin peut être interprété comme un rève, ou non, et se révèle donc ambigüe. Pour ma part, je la prend comme une scène où le désir de la mer est montré de manière amplifiée. En effet, malgré la soufrance considérable qui attend Barr au tournant de la mort, celui-ci, tant la mer l'attire (car ce dont il est question ici ce n'est pas tant la fuite de la réalité et du monde terrestre, mais bien l'attirance pour le milieu aquatique) rejoint le dauphin sans hésiter, dans une ultime immersion, une ultime plongée, une ultime fusion avec la mer, avec lui-même. Le Grand Bleu est une éloge à la fois du milieu apnéiste dont Besson a tant dû admirer les performances (d'autant plus qu'un accident l'a empêché de poursuivre la plongée à haut niveau) et à la fois de la mer, tout simplement. A mon sens, il manque, pour une durée si longue, des scènes avec la mer. Je m'en foutais un peu de l'histoire de la journaliste qui prend beaucoup de place dans le film, même si je suis pleinement conscient qu'elle sert au public féminin, qui permet par conséquent aux femmes de s'identifier à elle, à l'histoire d'amour, et de fantasmer sur le magnifique Barr. Le film, bien que perfectible, bien que quelques détails m'aient gêné, reste abouti et restera une oeuvre de référence pour ce qui est des films traitant de la mer. Il s'agit ici, quoi qu'il en soit, d'une belle éloge à ce qui représente 70% de la surface de la terre, et à qui l'on doit le nom de notre chère planète : Bleue.