A l'image de beaucoup de films de la Nouvelle vague française, Hiroshima mon amour souffre aujourd'hui du recul que nous avons sur le cinéma, et d'un style révolutionnaire a l'époque qui aujourd'hui ne passe plus vraiment. Pour tout dire, Hiroshima mon amour me semble être un livre illustré, mais où l'illustration est très secondaire. En effet, Alain Resnais adopte une narration et surtout des dialogues très littéraires. Si ce mode permet d'expliquer des idées précises, complexes et profondes, il n'est pas franchement adapté au cinéma. Le jeu d'acteur d'Emmanuelle Riva et Eiji Okada s'en ressent : cela ne nous paraît pas naturel, c'est surjoué, surréaliste, on doute fort que des personnes s'expriment comme eux, même dans les années 50/60. Ce qui fait qu'on y croit pas, et qu'on à plus de mal à se passionner pour le fond, car l'aspect n'est pas plaisant. La caméra elle, ne film pas grand chose, si ce n'est des gros plans alternés sur les deux personnages principaux de cet oeuvre, sur le couple franco japonnais. Finalement, Hiroshima mon amour se consomme comme si quelqu'un vous fait la lecture; non pas que je n'aime pas cela, mais ce n'est pas adapté au format cinéma. Car pourtant, si on se concentre sur le fond des choses, Hiroshima mon amour est grand : c'est la rencontre entre deux destins brisés, deux histoires de la seconde guerre mondiale, a la fois lointaines et proches; une française, victime de l'épuration pour avoir à ses 18 ans eu une relation amoureuse avec un soldat allemand - un japonnais, victime du bombardement atomique d'Hiroshima. On perçoit vite le film de Resnais comme un prolongement logique de "Nuit et Brouillard" dans cet appel à la mémoire; le couple, chacun de leurs côtés, cherchent à oublier leur douloureux passé, mais en ayant de la pitié pour celui de l'autre, ils en reviennent encore et toujours, si bien que leur amour semble impossible et destructeur car ils ne pourront jamais être en paix. Profond et beau, il n'y a rien à dire la dessus, c'est sûr. Mais encore une fois, l'effet Nouvelle Vague, génial à l'époque, montre aujourd'hui ses grosses lacunes de mise en scène; on relèvera dans Hiroshima mon amour une certaine intelligence dans l'utilisation des flash back, à l'évidence, mais beaucoup d'éléments, comme les longs plans fixes sur les protagonistes et surtout le style littéraire des dialogues ne seront pas repris. Mais ne nous méprenons pas : Hiroshima mon amour est intéressant et touchant, il faut briser la glace pour comprendre le sens profond de celui-ci. Mais ce n'est pas toujours chose aisée.