Seule incursion de Stanley Donen dans le registre science-fictionnel, il est malheureusement peu dire que « Saturn 3 » est l’une des oeuvres les plus faibles de son réalisateur, quatre ans avant le nouvel échec artistique que sera « C’est la faute à Rio. Car si la réputation de nanar intersidéral qui colle à la peau du film peut paraître légèrement excessive, elle n’en demeure pas moins un minimum justifié. Pourtant, on est au départ intrigué par cette histoire d’imposteur prenant la place d’un cosmonaute dans le but de rejoindre la station Titan, sur un satellite de Saturne. Non pas que l’idée soit des plus innovantes, c’est plus les intentions de l’énigmatique Benson qui interpellent : Que compte t-il faire sur une station spatiale où vivent totalement isolés deux savants ? Et plus simplement, qui est-il ? Le problème, c’est que la seconde question ne sera jamais éludée, et la première peu convaincante. Où du moins la manière dont Donen la traite. Après tout, que ce soit grâce à Fred McLeod Wilcox et son remarquable « Planète interdite », James Cameron et ses « Terminator », John Badham et son sympathique « Short Circuit », Isaac Asimov et sa mythique saga littéraire ou encore Michael Bay et ses « Transformers » (non, je déconne pour le dernier) pour ne citer qu’eux, il est désormais connu que le robot peut être un personnage fascinant et complexe, et ce qu’il soit du bon où du mauvais côté. Nous en sommes loin ici. Hector, le robot en question, s’avère avant tout une grosse machine, sans âme ni personnalité, apparaissant même presque comme un prétexte pour nous offrir une course-poursuite peu captivante et surtout sans grande imagination. En effet, au lieu de se focaliser sur la tension entre les trois personnages principaux, sans doute les passages les plus réussis du film avec les premières scènes, Donen, peu aidé par des dialogues inconsistants, préfère nous livrer une sorte de gros film d’action sans fond mais surtout très premier degré, alors qu’un semblant d’humour aurait peut-être sauver les meubles d’une production échouant dans à peu près tout ce qu’elle tente. Les décors font ainsi illusion simplement au début du film, avant de montrer leurs limites à peine arrivés sur la station Titan, le manque de plans larges n’étant à ce titre pas anodin, tandis que les costumes ressemblent à des pyjamas ringards quasiment dignes des productions Eurociné. Les bonnes idées se font de plus en plus rares au fur et à mesure que le film avance, et s’avèrent en général mal exploitées, à l’image de ce rapport entre l’homme et la machine complètement bâclée et simpliste, ne donnant lieu à aucune véritable réflexion, que ce soit sur la difficulté de vivre complètement isolé du monde contemporain (à l’image du très beau « Moon » sorti il y a trois ans, où même de « Silent Running », il y a trente ans) ou encore sur l’ambiguïté qui caractérise habituellement un robot. Pire que tout : on ne peut même pas se rabattre sur l’interprétation, ce qui semblait pourtant chose acquise. Harvey Keitel est proche du ridicule à force d’être monolithique du début à la fin, incapable de proposer une autre expression que celle de la colère contrôlée, mais que dire de Kirk Douglas, offrant une véritable caricature de ce qu’il fait habituellement, à coup sûr (et de très loin) l’une des plus mauvaises prestations de son immense carrière. C’est paradoxalement Farrah Fawcett qui s’en tire le moins mal. Non pas que celle-ci soit vraiment inspirée, mais sa beauté, son charme et sa sensualité apporte une petite saveur à une oeuvre qui en est presque totalement dénuée. On retiendra tout de même, de-ci de-là, quelques scènes plaisantes, à l’image de cette partie d’échecs engagée par Adam et Alex et que le premier continuera avec le robot, ou encore l’opposition entre Adam et Benson, ouvrant quelques perspectives qui resteront hélas sans suite. On pourra alors soit faire preuve d’une légère indulgence pour un film gardant aujourd’hui (et de manière assez miraculeuse) un petit charme rétro, soit le ranger directement dans la catégorie des nanars de luxe. En tout cas, une chose est certaine : lors du visionnage de ce « Saturn 3 », l’époque du Stanley Donen de « Chantons sous la pluie », « Beau Fixe sur New-York », « Charade » et autres « Voyage à deux » vous paraîtra, à l’image de la galaxie « Star Wars », lointaine, très lointaine...