"L’âge de glace" : un titre qui m’a longtemps rebuté, sans doute à cause des mauvais restes que j’avais du film de Jean-Jacques Annaud quand j’étais gamin, à savoir "La guerre du feu" (qu’il faudra que je redécouvre à l’occasion). Heureusement, avoir des enfants vous pousse quelquefois à passer au-dessus des à priori. Heureusement parce que j’avais été alors largement récompensé par une belle et immense surprise qui m’a fait fondre de plaisir, tant et si bien que je me suis repenché sur cette fiction préhistorique afin de vous livrer cet avis. Pour commencer, on ne peut pas dire que le scénario soit très crédible, plombé en prime par des anachronismes (le dodo vivait à l’Ile Maurice, et en est même l’emblème). Pensez donc : un mammouth solitaire alors qu’il est censé ne se déplacer qu’en troupeau, un paresseux censé ne pas être hyper actif, et un tigre à dents de sabre censé être le prédateur du mammouth. Mais que voulez-vous ? Tout est possible dans le monde de l’animation. Ainsi un trio improbable a été formé pour notre plus grand plaisir, car la recette a marché contre toute attente. La preuve, le filon était tellement bon que nous avons au moment où j’écris ces lignes 5 épisodes en tout et pour tout. Tout commence avec l’animal catastrophe ambulante, un persévérant écureuil malchanceux nommé Scrat à la recherche d’un endroit pour cacher son gland. Ce simple vœu ne va pas être sans conséquence, car cela ouvre à bien des péripéties dignes d’un cartoon made in Looney Tunes, jusqu’à ce qu’il se fasse piétiner par un troupeau en pleine migration. C’est ainsi qu’entre en scène Manfried, un mammouth en apparence peu avenant, puis Sid un paresseux pas si paresseux que ça, surtout au niveau de la parlotte, promu idiot de toute la calotte polaire. C’est d’ailleurs ce dernier qui va provoquer malgré lui bon nombre de situations truculentes et des répliques cultes, lesquelles constituent une véritable fenêtre sur l’esprit de créativité des scénaristes à l’imagination débordante. Il y avait pourtant de quoi s’emmêler les crayons, car les scénaristes étaient nombreux (au nombre de 9). Mais voilà : avec le fourbe tigre à dents de sabre, rusé mais non dénué d’une conscience, nos sympathiques personnages vont former un trio, et des trios comme celui-là, ça ne court pas la calotte polaire ! Cependant il fallait tout de même un fil conducteur pour nous inviter à suivre ces compagnons de route, malgré des desseins bien différents. Ils ont été humanisés, bien que les animaux montrent souvent plus d’humanité que les humains eux-mêmes. A cela a été rajoutée une petite parabole sur l’art de vivre avec les autres, une sorte de cohésion en s’accommodant des différences, ponctué par un épilogue quelque peu émouvant, voire déchirant pour les plus jeunes d’entre nous. Et puis c’est en redécouvrant cette petite merveille que je me suis aperçu que les scénaristes avaient semé des graines pour laisser germer d’éventuelles suites (comme un dinosaure ou une soucoupe volante figés dans la glace). Le doublage a également contribué au succès rencontré (plus de 3 millions d’entrées) en France, et je crois que nous sommes tous d’accord en disant que c’est Elie Semoun qui emporte la palme des mentions spéciales en prêtant sa voix à Sid, avec le petit détail qui tue : le cheveu sur la langue. L’animation est bonne, les courses de Diego sont bien rendues, le pachyderme et l’écureuil sont sans conteste les animaux les plus réussis, tant au niveau des déplacements qu’au niveau de leur pelage. Quoique Sid n’est pas mal du tout non plus, avec son ventre bedonnant… En somme, "L’âge de glace" nous apporte 81 minutes de bonheur, à tel point que nous ne nous saurions nous lasser de voir et revoir les aventures de ce drôle de trio.