Un film assez unique, le genre d'oeuvre que vous ne reverrez certainement pas à l'identique. Ce n'est pas pour autant un chef d'oeuvre, et j'attendais beaucoup mieux de ce célèbre film de guerre du grand Ridley Scott. Par où commencer? Peut-être par dire que l'aspect visuel ne manque pas d'intérêt; le film est en effet tourné sur des teintes bleu pâle, jaune poussiéreux et vert grisonnant; c'est à la fois sobre, dans la mesure où le film a des allures de documentaire réaliste, mais aussi esthétique, des plans pouvant ressembler à de véritables oeuvres d'art. En clair, le style visuel du film a quelque chose d'attirant et d'immersif. Immersif, j'imagine que le film tente de l'être dans son ensemble, dans la mesure où son but semble être d'immerger totalement le spectateur dans l'enfer du conflit de Mogadiscio. De l'action, de l'action, et encore de l'action: voilà comment définir la majeure partie de Black Hawk Down; sans euphémisme, je crois que je n'ai jamais vu un film avec autant de scènes d'actions. Fusillades interminables, explosions à la chaîne et scènes de guerre en tout genre jalonnent le film de bout en bout; c'est du Ridley Scott, grand réalisateur d'action, donc c'est une bonne nouvelle, me direz-vous. Détrompez vous. Le Ridley Scott que vous avez là semble avoir perdu régressé depuis Gladiator: la majeure partie des scènes de guerre est constituée d'une succession d'images s'apparentant souvent à de la bouillie visuelle; on a droit, ça et là, à quelques plans spectaculaires, la photographie nerveuse rend ces scènes plutôt réalistes, mais, dans l'ensemble, les séquences de guerre endorment le spectateur par leur caractère répétitif plus qu'elles ne l'interpellent. Parlons du réalisme: ces scènes dévoilent elles les horreurs de la guerre comme il se doit? Là encore, Scott déçoit. On a bien quelques scènes sanglantes assez graphiques, une scène gore tendue et plutôt marquante, mais, dans l'ensemble, les dizaines de minutes de scènes de guerre paraissent bien fades et édulcorées. On est loin du réalisme glacial du Soldat Ryan. Bref, les très longues séquences de combat de Black Hawk Down ne sont ni vraiment spectaculaires, ni vraiment réalistes (pas assez révélatrices des horreurs de la guerre). Scott a donc tenté de plonger le spectateur dans l'enfer de Mogadiscio: tel était certainement le pari. Cette plongée ne s'avère cependant ni vraiment jubilatoire, ni franchement horrifique. Pour moi, Scott a trop misé sur les scènes d'actions, rendant le reste du film: personnages, psychologie, scénario, contexte historique, presque nul. Aussi le message du film est-il difficile à saisir. Au premier abord, Black Hawk Down semble être un film neutre, objectif, documentaire, même. L'opération "Restore Hope II" est reconstituée avec réalisme, sans travestissement de la réalité (si mes piètres connaissances historiques ne me trompent pas), avec une partie de son contexte, à savoir la famine en Somalie. Aucun "héros" ne sort du lot, tous les personnages semblent être des soldats précipités dans l'enfer de la guerre dépeints avec un réalisme certain. Pourtant, c'est du point de vue Américains que Scott tourne le film; les Somaliens sont réduits à de la chair à canon, des ennemis de jeux vidéo, des cibles de tir à pigeon, ou, aux mieux, apparaissent dans un rôle quasi contemplatif pour quelques plans éphémères. L'empathie du spectateur va donc aux seules personnes humaines présentes dans le film: les Américains. Et la musique de Hans Zimmer se plaît parfois à prendre des accents épiques lorsque des plans, à l'esthétique sublime, filment les braves marines en treillis qui repartent au combat. Quant aux images au ralenti où les soldats se font acclamer par le peuple somalien, elles sont assez explicites. Il serait cependant abusif de ranger ce film dans la catégorie "pro américain". On voit clairement que Scott a de l'admiration pour ces dizaines de soldats venus plonger dans l'enfer de Mogadiscio pour une cause humanitaire. Mais il reste également lucide sur les horreurs de la guerre; morts stupides, plans gores et une scène tendue et dramatique, suffisent à faire comprendre au spectateur que la guerre n'est pas un simple jeu vidéo. Pas un film de propagande ni un film anti-guerre, ni un vrai film d'action; au final, un film qui pêche peut être par sa neutralité documentaire. Le problème, c'est que le film se concentre sur l'aspect purement belliqueux de ce conflit alors que, comme nous l'avons vu, les scène d'actions ne sont pas extraordinaires. Les motivations et l'idéologie des deux camps, la vie des soldats, celle des civils somaliens par rapport à l'évolution du conflit, ne sont pas, ou très peu décrits. Dommage, car c'est une époque assez fascinante, qui aurait méritée un développement plus approfondi dans le film. Mon avis est purement subjectif, et n'est pas partagé par beaucoup de cinéphiles, aussi je vous exhorte à voir cette oeuvre, peut-être y découvrirez vous un intérêt qui m'a échappé...