Washington-2054. Depuis six ans, plus aucun meurtre ne s'est produit grâce au "Pré-Crime",unité policière dirigée par John Anderton. Pré-Crime dispose d'un système lui permettant de visualiser les meurtres avant qu'ils ne se produisent. John et son équipe procèdent alors à l'arrestation des futurs coupables. Mais quand John découvre qu'il est lui même accusé d'un meurtre à venir, il n'a que 36 heures pour comprendre le véritable fonctionnement de ce système qui a décidé de le traquer...
"Je suis à une période de ma vie où je souhaite expérimenter, relever des défis, aborder avec mes équipes des sujets nouveaux. Minority report est un mystère, une énigme autour d'un crime futur, un film qui vous embarque dans une aventure humaine: l'histoire d'un personnage marqué par une tragédie et qui tente de retrouver son équilibre". Ces quelques mots résument les intentions de Steven Spielberg. Un retour au cinéma de divertissement qui s'inscrit tout de même dans la continuité de A.I. Il ne s'agit donc pas d'un film aussi profondément personnel et risqué que son précédent. Néanmoins, Spielberg parvient à offrir aux spectateurs un film à la fois grand public et intelligent, ce qui en déconcertera plus d'un.
Polar sous influences diverses, Minority Report peut apparaître comme un film d'action dont la richesse se fait pesante par moments. Pourtant, on finit par s'y habituer, une fois plongé dans la folle course-poursuite qui constitue la partie centrale du film. La présence d'humour se justifie probablement par une volonté de laisser souffler le spectateur quelques instants avant de le faire pénétrer à nouveau dans un univers d'insécurité constante. On retrouve ainsi un désir perfectionniste de crédibilité enrichit ainsi de détails plus ou moins "réalistes" la science-fiction de Philip K.Dick, auteur de la nouvelle originale.
Cependant, le doute de l'individu sur sa propre identité, sur sa personne, l'un des thèmes chers à l'écrivain, n'est pas le thème le plus représenté ici. Spielberg a préféré exploiter la notion de paranoïa abordée par K.Dick en l'accentuant de façon à obtenir un environnement à l'opposé de ce que le système Pré-Crime essaie d'instaurer, la sécurité. On trouve aussi des références à Blade Runner de Ridley Scott, film auquel s'apparente le plus Minority Report, ces deux adaptations d'écrits de K. Dick partageant des points communs, à la fois esthétiques et thématiques.
Le protagoniste, John Anderton, est un homme dérangé à l'image d'Alex, protagoniste de Orange Mécanique, mais il représente également l'archétype spielbergien du parent fautif, de la famille dysfonctionnelle. Tom Cruise interprète à merveille ce personnage complexe et torturé. Le réalisateur se permet même des clins d'oeil visuels, comme celui de réutiliser les écarteurs de paupières désormais célébrissimes de Orange Mécanique. On voit là un metteur en scène qui s'amuse avec de nombreuses références à d'autres films. Minority Report est une oeuvre de science-fiction adulte et froide, traversée de part en part par la souffrance de ses personnages. Le film dure 2h25 et pourtant on reste captivé devant ce thriller futuriste. Le film parvient très habilement à jongler entre l'humour et l'angoisse, l'action et l'enquête, le tout avec une maestria visuelle évidemment éblouissante.
Le réalisateur se fait plaisir avant tout, et reste fidèle à lui-même. Il se permet, à travers cette critique d'une société, de mettre en évidence les failles du système pénal américain et notamment de la peine de mort. Le système n'est pas parfait et il nous le rappelle. Un film de science fiction majeur tant par sa réalisation que par son approche sensée. Du grand Spielberg!