Stromboli raconte l'apprentissage initiatique de l'humilité devant Dieu. Bien que le sujet soit plus ou moins clairement exposé dans le texte introductif, la présence de Dieu est avant tout symbolique: le volcan. Rossellini a évolué depuis Rome, Ville Ouverte et évite maintenant les lourdeurs didactiques, il recourt à des associations d'idées et des métaphores. Le sujet le nécessitait sans doute: son plaidoyer prosélyte est plus que contestable.
Là où le film est particulièrement subtil, c'est que le personnage principal joué par Ingrid Bergman est antithétique par rapport au groupe de villageois. Elle est étrangère, bourgeoise, alors que les habitants de Stromboli ont un mode de vie humble et ancestral.Sa métamorphose morale apparaissant ainsi singulière et l'antipathie qu'inspire le personnage font croire que le réalisateur ne cherche pas à franchir nos boucliers intellectuels.
Pourtant, malgré le libre choix que Rossellini prétend laisser au spectateur, certains intellectuels ont été, tels la protagoniste, métamorphosés par le film: Eric Rohmer a trouvé sa foi mystique en regardant Stromboli. Ce film n'est donc pas anodin et il faut le voir en connaissance de cause.
Si on laisse de côté sa religiosité, ce film a tout du bon film raté. Avant tout, en raison de sa technique approximative: par exemple pendant l'éruption du Stromboli, le réalisateur réutilise plusieurs fois les mêmes images, la bande son tourne en boucle avec les mêmes cris d'enfants récurrents, la postsynchronisation utilise parfois deux timbres de voix différents pour le même acteur...
Ingrid Bergman surjoue. De plus, la psychologie des personnages est très grossière, sans nuances donc. A peine arrivée sur l'île, pourtant de son plein gré et dans des circonstances plutôt heureuses, l'héroïne n'a de cesse que d'en repartir. Le film n'aurait été que plus poignant si elle avait lentement mûri son étouffement intellectuel.
Au final, un film brouillon et prosélyte, mais probablement à l'époque un des plus sincères réalisés par Rossellini.