Flamme fatale
C’est la deuxième fois que de Palma shoote en France, 6 ans après Mission Impossible. Et ce n’est certainement pas la dernière fois qu’il tourne en Europa, signe que les temps changent. Ce Femme Fatale, je l’avais vu au ciné à sa sortie et il m’avait laissé un goût amer, le signe que les temps changent. Qu’en est-il 20 ans plus tard ?
C’est l’histoire d’un casse qui se passe mal. Laure, en charge de choper les diamants, doit fuir seule avec le magot. Pour ses complices, c’est une trahison. Elle va devoir se planquer et s’inventer une nouvelle vie pour leur échapper. Ça dure un temps, jusqu’au jour où un paparazzi repenti va diffuser par erreur sa photo en 4x3 dans les rues de Paris.
Un film écrit par de Palma. Il n’était pas vraiment utile de le préciser tant c’est évident. Et c’est souvent par là que Brian pèche. Comme souvent, c’est la première séquence du film qu’il faut regarder attentivement et savoir apprécier. Ici, c’est sur le boléro de Ravel, en plein festival de Cannes qu’a lieu le casse le plus chaud (au sens hot) de l’histoire, alors que sur l’écran du palais des festivals se joue le Est-Ouest de Wargnier. Tout est ample, jeu sur la perspective, illusions du faux et du vrai. Probablement la meilleure scène du film. La seule diront les mauvaises langues. Il faut reconnaître que passé le tourbillon de cette séquence, ça s’endort un peu. La faute à un scénario quelque peu brouillon fait de redites (les doubles, les troubles d’identités, autant de thèmes vus dans Blow Out, Body Double, Mission Impossible, Obsession …) et surtout à une photo qui n’est clairement pas à la hauteur et qui rappelle les productions Europacorp de l’époque, du tout venant à la française en somme. A l’interprétation, c’est cheap mais ça fonctionne assez bien. Rebecca Romijn campe le rôle de vampe toxique à merveille et Banderas, s’en sort honorablement. Du côté des seconds rôles, c’est moins la fête. Alors que reste-t-il ? Il reste la mise en scène. Et là, c’est festival depalmien ! Tout l’attirail est invoqué : le point de vue subjectif, le split-screen, la double focalisation, emboîtement des plans les uns dans les autres, le jeu du hors-champ, des transitions d’orfèvre. C’est une véritable leçon voire un exercice de style. Un exercice vain et désincarné diront certains et ils auront probablement raison. La faute, encore une fois à un scénario mal ficelé, ce qui a souvent été le talon d’Achille de de Palma.
De ce projet, on conclura que de Palma n’est alors pas sur la bonne pente. Plus tard, Passion ou Domino confirmeront cette impression. Devenu non bankable, de Palma se tournera de plus en plus vers l’Europe, plus prompte à financer des projets d’auteur (même s’il n’est pas sûr que de Palma lui-même se reconnaisse dans ce terme). Et le Dahlia Noir ne parviendra pas à inverser la tendance. Reste que pour qui aime le travail technique, la mise en scène artisanale dans les règles de l’art et la vision bancale que proposent les obsessions de de Palma, c’est un film à voir, comme tous les autres, en sachant apprécier toutes ces petites choses d’un cinéma qui peine de plus en plus à exister.