En 1982, la version cinématographique des Misérables avec Lino Ventura est quasi légendaire et sans doute la meilleure adaptation du roman que l'on ait pu apprécier sur les écrans ces dernières décennies.
Toute l'originalité de Claude Lelouch a donc été d'innover en sortant du créneau traditionnel , de ne pas faire un remake , mais de conserver l'esprit du roman en transposant la mentalité des personnages à une époque plus contemporaine tout aussi difficile et trouble que la révolution française puisqu'il s'agit de l'occupation allemande, car c'est dans ces contextes forts que les gens révèlent leurs vraies personnalités. Et si l'on veut bien s'attacher à cette seule peinture des gens dont certains sont misérables faute de pain, d'argent , de ressources ou parce qu'ils sont juifs, on voit que d'autres le sont par leur esprit, leur agissement, soit que le fond est mauvais, corrompu, collabo ou toute autre perversion de la personnalité.
Sous cet angle, l'adaptation de Lelouch est remarquable , bien filmée et surtout bien interprétée. Une mention particulière pour Annie Girardot tout aussi remarquable dans son second rôle.
Contrairement à d'autres, je ne me suis pas ennuyè en revoyant ce film. Même si je dois reconnaître qu'à sa sortie, j'étais perplexe car j'adorais la version Ventura, exceptionnelle; je pense aujourd'hui que cette autre façon de regarder Victor Hugo est presque aussi exceptionnelle, car c'est une Vérité : les comportements des gens se répètent, immuables : dans des conditions difficiles il y a eu, il y a encore , il y aura toujours des Misérables, mais ceux qui le sont par pauvreté ne sont pas forcément ceux qui basculent dans la seconde catégorie à savoir celle des vilains corrompus, bien au contraire.
On notera enfin qu'on sent bien à travers ce film que Lelouch a été marqué par la guerre et la traque des Juifs de par sa propre histoire personnelle : la collaboration française est bien étrillée...