La Grande Illusion, classique du cinéma français, film d'entre deux guerre, mise en scène par Jean Renoir, tout cela augurait d'un métrage de qualité, et ce, malgré mon profond désintérêt pour les films de guerre. Mais quand un grand cinéaste s'y penche, je suis souvent curieux, et ce fût le cas aussi pour La Grande Illusion. Et j'aurai eu tort de passer à côté. Car Renoir rejoint le groupe des réalisateurs m'ayant fait aimer un films de guerre. Mais Pourquoi ?
Et bien parce que c'est n'est pas un film de guerre, mais un film sur des soldats fait prisonniers en temps de guerre. En cela, la mise en scène de Renoir s'articule en deux mouvements, un de rassemblement, qui regroupe les personnages et rend visuel leur solidarité et leur cohésion, et un seconde mouvement, d'enfermement cette fois qui isole et étouffe les personnages, tel que des encadrements de portes, de fenêtres ou la pièce en elle-même. Les seuls plans larges seront d'ailleurs dans la dernière partie, une fois la liberté acquise. Dans un certains sens cela est aussi une des limites du métrage, la répétitivité de sa mise en scène, mais au vu de sa beauté et de sa pertinence, il serait dur de lui en tenir rigueur.
De plus, les cadres du film, ainsi que sa photographie, sont d'une beauté rare, ce travail sur les claires obscurs est magnifique, et Renoir opère un travail pictural tout simplement remarquable.
Toutefois, l'écriture du film laisse parfois à désirer. Les personnages secondaires, par exemple, sont bien moins bien loti que les principaux, se distinguant souvent par un seul trait de caractère, ou encore certaines scènes qui, bien que sympathiques, sont exécutés avec lourdeur, à l'image de celle où les soldats se retrouvent autour de vêtements de femme. Mais le point le plus important, est à la fois, la plus grand qualité du film, mais aussi son plus grand défaut : son humanisme. La Grande Illusion est un humaniste, profondément humaniste, les personnages du film sont tous bons et ne sont que las de cette guerre qui dure depuis trop longtemps, tout en rêvant à ce que cela soit la dernière. Mais très vite il devient compréhensible que le film ne fait figure d'aucun antagonisme, c'est à la fois très beau et plein d'espoir, mais, tout en prenant en compte le contexte, le métrage ne fait figure d'aucune nuance et semble parfois forcer, à l'image du judaïsme d'un des soldats, ou de la romance français-allemande. Romance toutefois émouvante, car elle délaisse les mots, au profit de silence et de jeux de regards paradoxalement bien plus parlants. La naïveté du film est clairement un défaut d'écriture, mais dont la présence est d'une réelle beauté et bouleverse lors de nombreuses scènes.
La Grande Illusion se révèle donc être un grand film, pas un chef d'oeuvre, de part ses défauts d'écritures évidents, mais un grand film pacifiste tout de même, à la beauté plastique stupéfiante, et formellement remarquable. Un film qui rêve de paix et de fraternité qui parvient sans mal à bouleverser.