« Oui, encore moi. Le moins qu’on puisse dire c’est que vous n’êtes pas facile à joindre. »
Réutilisant des décors d’autres de ses films, André Hunebelle s’essaie pour la quatrième fois au film d’aventures de cape et d’épée, après un sympathique Trois Mousquetaires (1953), un Cadet Rousselle (1954) raté et un Bossu (1959) qui a fort mal vieilli. Au scénario, dans cette adaptation d’un roman de l’anarchiste Michel Zévaco, on retrouve deux fidèles du réalisateur : Jean Halain, qui n’est autre que le fils d’Hunebelle et deviendra le principal dialoguiste de Louis de Funès et Pierre Foucaud. La musique est confiée à un autre fidèle d’Hunebelle : Jean Marion.
Le Bossu ayant malgré tout eu énormément de succès à sa sortie, le réalisateur reprend le couple Jean Marais/Bourvil, dans des rôles stéréotypés : celui du héros sans peur et amoureux et celui du valet, compagnon, pleutre et drôle. Si le premier offre une prestation sérieuse, notamment dans les cascades et les combats, un peu trop théâtrale dans les dialogues, le second se perd hélas trop souvent dans ces cris qui deviendront sa marque de fabrique. Quelques scènes cependant sont fort bien menées, comme celle du début où l’on découvre le personnage de Cogolin ou la leçon d’escrime ou même la fuite du Château de Clairefont, quasi melvinienne. A ce couple en répond un autre en négatif, Arnoldo Foà/Guy Delorme. Le premier, illustre comédien et acteur italien, doublé à la perfection par Georges Aminel, interprète avec beaucoup de naturel le tout-puissant Maréchal d’Ancre Concini, le second, figure typée du méchant, également cascadeur, est plus représentatif dans son rôle en action. Autour des quatre hommes, on retrouve Elsa Martinelli, icône de la mode qui explosera dans les années ’60 en tournant avec les plus grands réalisateurs italiens, américains et français, Lise Delamare, qui jouait déjà dans la première adaptation du Capitan (Robert Vernay, 1946) et Pierrette Bruno, restée célèbre pour son rôle dans la pièce La Bonne Planque, avec Bourvil.
Si les trois précédents films de cape et d’épée d’André Hunebelle étaient surtout des prétextes à quelques scènes amusantes ou d’action, ce Capitan est beaucoup plus construit, plus enlevé que ses prédécesseurs (malgré un montage chaotique), plus classique aussi, si l’on excepte les scènes de comédie musicale assez lunaires, ce qui permet enfin au réalisateur d’opérer en tant que tel, sans plus être brouillon. Malheureusement, les raccords sont encore parfois trop mal faits et altèrent la chorégraphie des scènes de combat. Comme pour Les Trois Mousquetaires, les décors sont assez bien rendus, historiquement plus crédibles que le pitch lui-même.
Au final, si on est loin du chef d’oeuvre, ce Capitan offre un agréable divertissement suranné, un film qui fait partie de la petite histoire du cinéma français.