La guerre peu être distillée à de multiples fins, c'est un inépuisables thème cinématographique, autour duquel tournent de grands chef d’œuvres du 7ème art. Empire du Soleil en est un, c'est aussi un des meilleurs films de Spielberg (subjectivement : le meilleur), car il déroge à toutes les conventions attendues, ou à la dureté de la critique de l'envers du décors, et se pose en objet unique sur lequel il y a de quoi s'extasier à chaque vision : le périple d'un enfant plus malin que les autres qui traverse cette sombre époque. Un héros incarné par Christian Bale bouleversant, qui suscite de l'affection banale au premier abord – après tout c'est un gosse, plein d'apétit de vivre et de curiosité – pour se transcender complètement à nos yeux. Empire du Soleil se hisse à un niveau émotionnel sublime, montrant tout ce qui fait le sens de la vie en 2h30 : les passions, les rêves, l'épreuve de survie, les petits plaisirs pris à observer...Spielberg a su trouver le rythme parfait, oscillant entre la lenteur de la fresque et une nervosité virtuose plus accélérée. Sa caméra emballe des plans gargantuesques de décors grandioses sous une mouture photographique splendide. De larges panorama sont ainsi balayés avec une ampleur impériale. Le film s'impose en tant que véritable édifice visuel qui n'a pas à trembler des superproductions hollywoodiennes les plus respectées (Autant en Emporte le Vent). La musique de John Williams se fait souvent discrète, et le champ des pilotes constitue à lui seul un morceau de bravoure inégalable qui réchauffera notre cœur longtemps après la fin du film. Les acteurs se distinguent tous avec des prestations très convaincantes, chaque personnage même secondaire est difficilement oubliable. Ils dressent des visages blafards face au spectateur, des portraits détruits par la guerre, dévoile une psychologie des plus terribles, nous plongent à bras le corps dans l'enfer de la Seconde Guerre Mondiale. Empire du Soleil est un grand film sans concessions. Les scènes les plus sinistres cohabitent avec les montées d’espoirs paroxysmiques aboutissant à des hécatombes insoutenables où une agonie douloureuse. On se sent flageolant, léger comme une plume, à peine plus épais qu'un fantôme, au fur et à mesure que l'emprise de l’œuvre se referme sur nous. Les scènes qui confinent à la tragédie pure dans son efficacité la plus absolue s'enchaînent, nos yeux brillent davantage à chacune d'entre elles. La violence abonde, le sang coule, il y a des instants insoutenables qu'il est impossible de contourner par une appréhension « geek » que l'on pouvait avoir avec Il faut sauver le soldat Ryan. Il y a des vérités qui s'alignent, des cruautés digne d'Apocalypse Now, comme la mort du pilote. Et enfin, il y a l'hallucinant regard vide de Christian Bale lorsque ses parents viennent le chercher, image la plus marquante de ce chef d’œuvre, qui me hantera éternellement.