Mon premier film de Lumet, vu lors d’une rétrospective dans un petit cinéma perdu et à moitié vide. De quoi renforcer l’aspect traumatisant de l’expérience froide que constitue The Offence. Les murs d’un commissariat éclairés d’une lumière blafarde renvoient sans cesse à l’obsession qui poursuit son héros pendant les trois quart du film. Incarné par Sean Connery dans un rôle atypique, où il se révèle extrêmement convainquant, fragile sous ses manières impulsives et brutales et sa carrure d’ours. Le scénario de ce film ainsi que ses dialogues constituent son gros point fort. La quête que poursuit le personnage principal entraîne tout sur son passage, certains protagonistes résistent (Cartwright, incarné par le génial Trevor Howard, toujours magistral quand il joue les mentors solitaires) tandis que d’autres sont emportés dans ce courant impétueux (sa femme, Maureen). La réalisation de Lumet, si elle se révèle pauvre sur le plan esthétique, présente une structure en tiroirs élaborée, créant le doute, nous jetant dans un jeu cérébral et glaçant. La violence est également omniprésente, bien qu’elle ne se traduise pas souvent par des actes (mais quand c’est le cas, ça saigne…), mais plutôt par des agressions psychologiques. Ceci est renforcé par un sentiment d’oppression qui s’exerce constamment sur le spectateur : que Johnson soit dans les bois, au commissariat ou chez lui, l’impression de huis clos persiste. La scène est toujours bloquée dans un espace relativement réduit, où se meuvent les personnages emprisonnés. La musique, la plupart du temps inexistante, laisse place à des sons aigus et stressant. Et toute l’œuvre est une lente montée crescendo de cette violence inexpugnable, de cette exploration psychologique sondant à des profondeurs toujours plus élevées le duo Johnson – Baxter.
Personnellement, j’ai pensé à Christopher Nolan et à Tarantino. On sent bien l’influence de Lumet sur ces deux cinéastes contemporains. Et si vous effectuez la comparaison entre leurs films, peu d’éléments changent. A peine les costumes et les styles d’époques se remarquent, tant Lumet semble avoir été désireux de les effacer. C’est du cinéma intemporel, qui touche au subconscient humain…ce dernier évolue t-il donc ?