Les Fantômes du passé est un film qui, bien qu'il date de 25 ans, est assez actuel pour ses interrogations sur les crimes racistes et la justice aveugle. Rob Reiner adapte un terrible fait divers, celui de l'assassinat d'un leader activiste noir qui va voir le meurtrier face à la justice plus de vingt-sept ans après les faits, à l'époque où le Mississippi était encore ségrégationniste.
Le contexte du film suffit, déjà, à le rendre intrigant. On est plongé dans une époque semblant lointaine sans vraiment l'être, où l'on croise de nombreuses mentalités racistes face à ceux cherchant la vérité et à faire évoluer les choses. Ce contexte, aussi passionnant soit-il, est aussi symbole des limites d'un film qui ne cherche pas à aller plus loin qu'une reconstitution classique d'un fait fort et ambigu, capable d'émouvoir juste par son horrible vérité.
Malgré ça, Rob Reiner hérite d'un scénario tout de même bien construit, sachant insister sur les bons éléments tout en allant à l'essentiel. La force du film passe avant tout par les personnages, ceux principaux sont assez riches, on peut en voir la profondeur et l’ambiguïté (ou non), et c'est toute une partie sombre de la nature humaine qui peut refaire surface.
La mise en scène est à l'image du scénario, assez classique mais efficace. Si elle ne prend pas les risques suffisant pour faire rentrer le film dans une autre dimension, elle retranscrit avec fidélité et simplicité cette histoire qui ne l'est pas. Reiner fait les bons choix, que ce soit dans les personnages sur lesquels insister, ou les points importants, à l'image du procès final. Il s'appuie vraiment sur le cadre de l'œuvre, l'Amérique profonde et ses particularités, quitte à aller trop loin dans le parti pris (peu de subtilité sur le personnage de Byron De La Beckwith notamment). Malgré ça, bien des aspects sont intéressants, à l'image d'une justice aveugle, l'importance et l'implantation de certaines mentalités ou du KKK, ou bien des éléments de la nature humaine, qu'ils soient bons ou mauvais.
Si le film est efficace, c'est notamment grâce à la bonne gestion du rythme, ainsi qu'une certaine tension qui s'installe, jusqu'à une dernière partie très bien gérée et particulièrement passionnante. Le procès est effectivement bien mis en scène, avec des protagonistes forts ainsi que des discours plutôt mémorables. Si la musique est parfois trop omniprésente, elle n'en reste pas moins de qualité, plus particulièrement quand le blues est de sortie. Enfin, les comédiens sont très bons, à l'image d'Alec Baldwin, particulièrement obstiné, ainsi que James Woods montrant, à nouveau, quel formidable acteur il était, avec un rôle taillé sur mesure.
Se basant sur un fait divers obscurs et sordide, Les Fantômes du Passé est une réussite qui aurait, certes, mérité un traitement un peu moins académique, mais qui n'en reste pas moins intéressant à plus d'un titre et efficacement mis en scène, avec un contexte intrigant, des moments intenses, des personnages fouillés ainsi que de très bons comédiens.