Pierre Tchernia communément appelé « Monsieur Cinéma » par ceux qui ont connu son émission hebdomadaire diffusée de 1967 à 1980, aura réalisé quatre films pour le cinéma. Tous auront eu comme acteur principal, Michel Serrault avec lequel Tchernia partageait le goût pour l’humour décalé, bizarre voire nonsensique. « Bonjour l’angoisse », le quatrième et peut-être le moins flamboyant s’est teinté plus de trente ans après sa sortie d’un parfum nostalgique tout à fait plaisant et caractéristique du regard que portait sur le monde Pierre Tchernia, grand admirateur de Marcel Aymé, Michaud est un employé discret et timoré d’une entreprise de fabrication d’alarmes en restructuration qui compte se débarrasser de celui qui si il constitue la mémoire de l’entreprise (valeur déjà foulée aux pieds qui sera réévaluée par l’intrigue), ne se rebellera pas. Comme beaucoup de timides, Michaud se rêve autrement. La partie aventureuse de sa personnalité qui se matérialise à travers son reflet dans le miroir, sorte de Mister Hyde tenu en laisse, lui intime vertement d’enfin sortir de sa réserve. Le petit homme compense en rêvant à des exploits qui sont hors de sa portée comme être Elliot Ness débarquant au milieu d’un casse. Rêves qui le surprennent en pleine journée y associant ses collègues de travail. D’où son côté lunaire et maladroit qui lui attire les moqueries. Un hold-up dans une banque auquel il a assisté va changer sa vie et lui permettre de passer de l’autre côté du miroir. Aux côtés de Michel Serrault qui connaît sa partition sur le bout des doigts, on retrouve, Pierre Arditi, Guy Marchand, Jean-Pierre Bacri, Bernard Fresson, Hubert Deschamps ou Marion Game, tous excellents. La collaboration entre les deux hommes, sans doute ici moins tonitruante que dans les dantesques « Le viager » (1971) ou « La gueule de l’autre » (1979), lorgne plutôt vers la poésie et l’étrangeté des « Gaspards » (1973). C’est donc l’atmosphère que crée Pierre Tchernia qui constitue l’intérêt de ce film à découvrir tout comme les petites vignettes comiques qu’il distille pour chacun des acteurs. Où est le Pierre Tchernia d’aujourd’hui ? Sans doute un peu dispersé façon puzzle chez Albert Dupontel, Quentin Dupieux ou Benoît Délépine et Gustave Kerven.