Ben Affleck, c'est une drôle de carrière, un artiste capable du meilleur comme du pire, plus proche du pire que du meilleur lorsqu'il tournait dans ses premiers films. En atteste Phantoms, sorte de série b d'horreur annonciatrice du carnage à venir pour le genre dès les premiers jours des années 2000. Deux ans avant le prétendu grand bug informatique, Joe Chappelle, réalisateur inconnu déjà responsable d'Halloween 6 et Hellraiser 4, s'est motivé à tourner une sorte de film à suspens sur fond de complotisme hérité de la Chasse aux sorcières, plongeant dans un délire n'ayant plus aucun rapport avec le spitch de base.
Car s'il partait sur une histoire de ville fantôme, Phantoms préfère viser vers quelque chose de plus grand, pensant rendre l'expérience grandiose; Satan, mal incarné démoniaque qui dirige tous les méchants, résurrections à gogo et faux twist final annonciateur d'une suite qui, bien entendu, ne verra jamais le jour (heureusement).
Nul doute que le scénario n'a pas beaucoup de sens; si l'on suit les débuts du film comme ceux d'un énième Vendredi 13 (ou d'un film porno de l'orée des années 2000), l'apparition de Ben Affleck, Peter O'Toole et Liev Schreiber ne manquera pas de surprendre; doté d'un casting annonciateur de bons présages, Phantoms ne sait jamais les diriger et si l'expérience d'O'Toole l'empêche de vraiment rater son interprétation, il sera plutôt honteux de voir comment joue Liev Schreiber, entre le ridicule et l'excès, à toujours plus surjouer comme si le surplus devenait une preuve de qualité.
Évitons de nous intéresser à Rose McGowan (décidément seulement bonne chez Robert Rodriguez) et Joanna Going, tant leur présence et leur manque d'engagement les rend presque aussi invisibles que les fantômes qu'elles chassent. On pourrait presque y apercevoir, au vue du rôle de ces deux soeurs, les mauvais prémices de la série Supernatural, au demeurant bien plus sympathique.
Bien entendu, l'écriture ne viendra pas rattraper leur manque de talent; bordélique au possible, elle s'empêtre dans ses dialogues abrutissants et ses idées scénaristiques sans aucun sens, propulsant nos protagonistes dans une sorte de mélange absurde entre Prince des Ténèbres, La Maison de Cire et Body Snatchers, Phantoms plagiant clairement des scènes des Maîtres de l'univers et de The Faculty.
Et s'il prend ailleurs pour combler des vides, c'est surtout qu'il semble n'être qu'une mauvaise fan fiction de plusieurs influences mâchées et recrachées sans nuance ou quelconque notion de justesse. On s'amusera finalement à compter tous les clin d'oeil ou repompes d'autres films, sans vraiment être captivé par cette histoire irréaliste et incohérente, dont la qualité principale reste sa photographie globalement soignée, le tout gérant très bien les ambiances sombres en intérieur et les contrastes d'ombres.
Entre le médiocre et le mauvais, Phantoms vaut surtout pour le fait non négligeable de pouvoir voir Ben Affleck à ses débuts, à l'époque où il semblait se destiner à des petites productions sans grande imagination, gloubi boulga d'un peu tous les clichés possibles présents dans le genre. Un modèle de mauvais divertissement codifié jusqu'à l'étouffement, qui ne fait preuve d'aucune vision artistique ou quelconque réflexion/départ de développement d'opinion conséquent.