Au début du film, on se croirait chez Resnais. Le caractère théatral de "8 femmes", son décor d'intérieur typé et factice, ses couleurs vives et acidulées rappellent "Smoking, No smoking", tandis que lorsque les interprètes de François Ozon poussent la chansonnette, on se souvient évidemment du procédé de "On connait la chanson".
Pour autant, Ozon réalise une comédie originale, ludique et séduisante, un huis-clos au féminin dont les protagonistes sont, de la cuisinière à l'épouse, de la fille à la belle-mère, suspectes d'avoir assassiner le maître de céans. Qui et pourquoi?
A vrai dire, si le film s'organise autour d'une intrigue à la manière de celles d'Agatha Christie, la résolution de l'énigme n'est pas la préoccupation première du réalisateur, ni celle du spectateur d'ailleurs.
"8 femmes" est avant tout une comédie de personnages où chacune des actrices, à part égale et dans un ensemble homogène, incarne une nature, un genre. La communauté, en revanche, n'est pas soudée; le meurtre découvert et c'est le début d'accusations mutuelles et de persiflages, révélateurs de jalousies et de rancoeurs. Toutes ces femmes, cependant, expriment -notamment dans la chanson que chacune interprète- une solitude, un désenchantement qui toutefois n'entament pas leur fantaisie ni celle du récit.
Fort du talent de ses comédiennes, (mention à la jeune et pétillante Ludivine Sagnier et à Isabelle Huppert, en vieille fille sévère) et de sa parfaite direction d'actrices, Ozon réalise une oeuvre esthétique et chaleureuse, pleine de vitalité et, casting oblige, de charme.