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weihnachtsmann
1 141 abonnés
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3,5
Publiée le 17 juin 2018
Il est flagrant de noter les longs moments de solitude de l’enfant. Joie d’avoir découvert l’océan mais blasé déjà de l’immensité vide de cet espace qui symbolise sa vie. Tout ce monde qui gravite autour de lui et sa mère qui est tout le temps « occupée ». On voit le tragique. Après la solitude, l’errance.... dramatique existence.... Bon film
Jean Delannoy aura été avec Claude Autant-Lara, Yves Allégret et René Clément un des cinéastes les plus vilipendés par les jeunes turcs de la Nouvelle Vague, notamment par François Truffaut alors jeune critique, dans son article "Une certaine tendance du cinéma français" paru dans le numéro 31 des Cahiers du cinéma de janvier 1954. La caractéristique première de ces réalisateurs, représentants honnis d'une "certaine qualité française" était d'adapter le plus fidèlement les œuvres du patrimoine littéraire national à partir de scénarios souvent rédigés par le duo Jean Aurenche et Pierre Bost reconnaissable selon Truffaut à un académisme mécanique ne laissant guère de place à l'imagination. Rétrospectivement on peut dire que Jean Delannoy est sans aucun doute celui dont la filmographie répond le mieux à ces féroces critiques. Assez vite adoubé par les studios qui aiment sa ductilité, il aura plusieurs fois l'occasion de diriger de grosses productions en costumes qui paraissent aujourd'hui particulièrement empesées. C'est donc dans ses films plus intimistes qu'il faut se plonger pour tenter de discerner la vraie nature de cet homme profondément croyant dont la pudeur a pu nuire à son expression. En 1951 alors qu'il est solidement installé dans l'univers cinématographique de l'après-guerre, Delannoy s'attèle avec Henry Jeanson à l'adaptation du "Garçon sauvage", un roman d'Edouard Peisson, écrivain marseillais spécialisé dans le roman maritime. C'est un style tout à la fois direct et poétique que le réalisateur sans aucun doute très touché par le sujet, déploie à la manière d'un Julien Duvivier ou d'un Jean Grémillon. Faisant fi d'un préambule explicatif, la caméra inspirée de Delannoy nous amène sur un chemin de Provence où une carriole conduit Marie (Madeleine Robinson), une prostituée marseillaise rendre une de ses rares visites à son fils Simon (Pierre-Michel Beck) que ses tuteurs viennent d'abandonner chez un berger (Edmond Beauchamp). Les instincts maternels de Marie souvent dilués par son activité refont surface et la poussent à emmener son fils vivre avec elle à Marseille dans un univers qui lui est complètement inconnu. La relation entre le fils et sa mère oscille rapidement entre la joie des retrouvailles et la difficulté pour Simon à se faire une place entre les clients de sa mère parmi lesquels vient de s'immiscer Paul (Franck Villard), un bellâtre un peu niais qui se propose assez vite d'être le gigolo de service. Sans jamais juger, Delannoy dresse un portrait très touchant de cette femme sans doute devenue adulte trop vite qui n'arrive pas à faire le tri entre les sentiments qui la submergent. Madeleine Robinson trouve grâce à Jean Delannoy le plus beau rôle de sa carrière, parvenant à livrer une composition troublante de réalisme aux côtés du jeune Pierre-Michel Beck dont la sincérité et le charisme lui permettront d'interpréter dans la foulée l'adolescent du "Blé en herbe" de Claude Autant-Lara (1953) avant d'abandonner le cinéma après seulement trois films. Franck Villard qui semble ici en répétition pour son rôle inénarrable de gigolo ridicule du "Cave se rebiffe" (Gilles Grangier en 1951) est parfois un peu en décalage de ton mais il permet toutefois à Delannoy d'apporter un peu de la faconde marseillaise à cette histoire pathétique et assez sombre . A leurs côtés, Henri Vilbert, Fernand Sardou et Edmond Beauchamp grands professionnels sont au diapason. "Le garçon sauvage" était le film préféré de Jean Delannoy. On ne peut que lui donner raison tant il semble s'être ici débarrassé de tous les artefacts d'un savoir-faire un peu trop souvent mis à la solde des producteurs.
Prostituée à Marseille, Marie "récupère" ce fils encombrant qu'elle a confié jadis à des paysans et avec lequel elle n'a jamais vécu. C'est une idylle qui semble commencer entre une mère peut-être revenue à ses responsabilités et un gamin de 11 ans ravi d'avoir enfin une maman. Delannoy et l'époque cinématographique n'étaient sans doute pas les plus qualifiés pour traiter de façon probante la problématique psychologique du sujet. L'immaturité de Marie et la jalousie du petit Simon, lorsque l'amant Paul fait son apparition (Frank Villard, d'abord inquiétant puis se montrant un malfrat tellement médiocre et ridicule qu'il aurait pu faire l'objet d'une comédie), sont les deux traits principaux des personnages, aspects réducteurs, incomplets, auxquels il manque déjà un développement plus sensible et subtil. Sans démériter ni discréditer le roman du dénommé Edouard Peisson, Delannoy demeure tout de même dans l'évidence psychologique. Sa réalisation semble manquer de cohésion dans sa combinaison de comédie, de drame et d'étude psychologique, le film n'apparaissant abouti et rigoureux ni dans un registre ni dans l'autre.