Commencer l’année par un thriller, c’est une bonne idée. Commencer l’année par un bon thriller c’est encore mieux ! Le réalisateur Juan Carlos Medina propose avec « Six Jours » un polar original (qui n’est pas l’adaptation d’un livre) et qui vous prend un peu par surprise. 1h40 pied au plancher, c’est le cas de le dire au vu de la scène d’ouverture. Musique agréable et pas envahissante, utilisation intéressante du son, montage dynamique, le film bénéficie en outre de deux scènes de suspens aussi bien filmées que tendues. La première met en scène une armée de parapluies noirs (voir la très belle affiche), la seconde des supporter du LOSC avec fumigènes. Dans les deux cas la scène sera chorégraphiée pour rendre au maximum son suspens et sa tension, c’est du beau boulot. S’il y a des bémols à formuler sur « Six Jours », ce n’est pas de ce côté-là qu’il faut chercher. Et ce n’est pas non plus du côté du casting avec un Sami Bouajila impliqué comme il sait l’être. Il incarne un policier solitaire (pas de famille, aucun détail de ce côté-là comme si cela n’avait aucune importance), un peu tête brulée, apprentis écrivain à ses heures, un flic hanté par un cold case. Certes ce genre de personnage n’est pas follement original mais la force de Bouajila fait qu’on marche avec lui. Julie Gayet (un peu trop rare au cinéma), Philippe Resimont ou encore Yannick Choirat complète le haut de ce casting. Le personnage le plus intéressant étant celui incarné par Julie Gayet, la mère de Chloé. Parfois cassante, parfois désarmée, forte en apparence et abîmée en profondeur,
ce personnage s’avèrera au fil des minutes bien plus complexe et multicouche qu’on aurait pu le penser
. Le scénario de « Six Jours » nous prend un peu en traitre. Au vu du pitch et de la bande annonce, on imagine que le film va consister en un immense compte à rebours.
Et bien pas du tout ! La prescription arrive au bout de 20 minutes de film environ. A partir de là, le scénario va vous embarquer dans autre chose. Ce crime, qui restera donc impuni, va rebondir deux mois après la prescription, avec un nouvel enlèvement. Même mode opératoire, même impasses policières, on se dirige de nouveau vers un nouveau drame. Je n’en dis pas plus, le scénario étant suffisamment bien écrit et suffisamment malin pour que le rebondissement final fasse bien son petit effet « waouh ». Je ne l’avais pas vu venir ! Du point du vue de la moralité, chacun se fera sa petite opinion sur le dénouement de « Six Jours ».
Alors bien sur, si on chipote, on peut trouver des défauts à ce scénario. D’abord on peut trouver que les policiers de la BRI sont vraiment dépeint comme des types (et des nanas) arrogants, voire obtus, sans finesse et sans psychologie. Mettre en confrontation un flic courageux solitaire avec une équipe de flics bien bornés et droits dans leurs bottes, ce n’est pas nouveau, ce n’est pas très subtil non plus.
Et comme de bien entendu, ils vont droit à la catastrophe parce qu’ils n’écoutent pas « le petit flic courageux qui connait bien le dossier » !
Ensuite, on est troublé par quelques coïncidences bien pratiques
(le parapluie oublié dans le bar et que personne ne touche pendant 24 h), le criminel qui se gare pile là où il ne faudrait pas au moment précis où il ne faudrait pas, le « geek » de la police judiciaire qui fait des miracles avec deux bandes sons très pourries,
et j’en passe encore deux ou trois. C’est le propre des thrillers de prendre parfois des raccourcis avec la crédibilité, il ne faut pas trop faire une fixation là-dessus sinon, plus aucun polar ne trouve plus grâce à nos yeux de spectateur. Si l’on excepte donc ces personnages mal croqués et ces petites invraisemblances, le scénario fonctionne et il est bien efficace. Il nous mène en bateau pendant une bonne partie du film, on en sait que penser au fil des minutes qui passent et puis soudain, la révélation qu’on n’avait pas vu venir ! Moi, je ne demande pas vraiment autre chose à un thriller, alors je m’en contente bien volontiers. « Six Jours » est ce genre de film qui ne fonctionne bien que la première fois, pour avoir le plaisir de se faire surprendre.