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    Bushman
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    Yves G.
    Yves G.

    1 455 abonnés 3 482 critiques Suivre son activité

    2,5
    Publiée le 21 juin 2024
    À San Francisco, à la fin des années soixante vit un Nigérian, dont le visa va bientôt expirer. Gabriel se frotte à la contre-culture hippie, mais aussi au racisme ordinaire des Blancs et des Afro-américains qui le renvoient systématiquement à son africanité fantasmée.

    Ce film de David Schickele était jusqu’alors resté inédit en France. Il est sorti fin avril en salles dans une superbe restauration qui exalte son noir et blanc velouté. Avec lui, c’est le cinéma-vérité de l’époque qui ressurgit, aux frontières du documentaire et de la fiction. David Schikele a non seulement tourné en Californie mais aussi au Nigeria où il s’était engagé dans les "Peace Corps" au début des années soixante et avait enseigné l’anglais dans une université de l’est du pays.

    "Bushman" est d’abord un témoignage, qui a aujourd’hui valeur historique, sur l’Amérique de la contre-culture. Mais c’est aussi une réflexion plus profonde sur l’exil, sur la solitude, sur l’identité.

    Le tournage du film a été interrompu par l’arrestation et la déportation de son acteur, accusé de séjour illégal aux Etats-Unis. Le scénario racontait précisément l’angoisse grandissante de son personnage au fur et à mesure que l’expiration de son visa se rapprochait et finalement son départ. La réalité s’est avérée plus forte encore que la fiction puisque, sans attendre la fin du film, l’emprisonnement de son acteur, son procès et son retour au Nigéria en ont précipité le terme.
    Arthur Debussy
    Arthur Debussy

    154 abonnés 693 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 26 mai 2024
    Le « Bushman » éponyme, c’est Paul Eyam Nzie Okpokam, qui joue le rôle principal de Gabriel... écrit par le réalisateur David Schickele, en grand partie en s’inspirant de la vie de Paul. Gabriel / Paul est un jeune nigérian qui a fuit la guerre du Biafra pour trouver un (fragile) refuge aux Etats-Unis, en dispensant des cours à l’université de San Francisco, peu de temps après que Martin Luther King, Bob Kennedy et Bobby Hutton aient été assassinés (« Bushman » est tourné en 1968).

    Tout le film joue de ce mélange entre la réalité et la fiction, oscillant entre cinéma-vérité à la Jean Rouch (ces plans de Paul interviewé face caméra, racontant des anecdotes de son passé au Nigéria) et esthétique Nouvelle Vague, française (Godard, Rozier…) et américaine (Cassavetes, Bogdanovich…). On pourrait même filer la métaphore, en avançant que tout le long métrage est en constant équilibre, réconciliant les contraires et en faisant le pari de la subtilité, allant à rebours de bien des clichés. Tout en étant toujours juste, traitant de sujets graves avec une intelligence rare et un humour désarmant.

    Ainsi, « Bushman » a beau être un film en partie politique et engagé, il s’en dégage une grande douceur, qui doit beaucoup à son acteur / héros Paul, loin du militantisme coup de poing. On déboule dans ce film à travers son regard : les premières minutes débutent avec Paul qui porte ses chaussures sur la tête, marchant pieds nus le long d’une autoroute, avant d’être pris en stop par un biker affable… et raciste. Schickele a construit son film autour de la trajectoire de Paul et des rencontres surprenantes qu’il fait, dressant un portrait contrasté des Etats-Unis des années 1960 et de la contre-culture de l’époque.

    Tout d’abord, la caméra suit le couple formé par Paul et Alma, une afro-américaine charismatique et engagée, qui pousse Paul dans ses retranchements. « Tu ne sais pas parler noir » lui reproche-t-elle, tentant dans une séquence amusante de lui faire adopter l’accent du ghetto, qu’il a toutes les peines du monde à imiter… Où l’on comprend qu’être Afro-Américain et Africain est très différent. Paul concède par exemple que n’ayant pas l’accent local, il est directement identifié comme un étranger par les policiers, qui auront tendance à être davantage bienveillant avec lui (ça ne durera qu’un temps)… David Schickele ose ainsi introduire de la nuance et mettre en avant les contradictions des activistes afro-américains, qui rêvent d’une Afrique fantasmée, alors qu’il n’en connaissent pas grand-chose.

    Mais Schickele renvoie aussi l’Amérique blanche d’alors à ses défauts ou à ses fantasmes coloniaux. Après qu’Alma ait quitté Paul pour rejoindre ses compagnons de lutte à Los Angeles, notre héros se retrouve à errer dans le San Francisco hippie. Il couche avec une jeune femme blanche, étudiante en sociologie (on retrouve là l’humour de Schickele, qui se joue des clichés), avec qui il va passer une tendre soirée… Avant qu’elle ne le chasse de chez elle au petit matin, son « africanité » semblant dépasser son seuil de tolérance et son masque de bienveillance (factice). Elle a pu ainsi satisfaire son fantasme d’exotisme en épinglant un Africain à son tableau de chasse…

    Mais Paul ne se laisse pas démonter, avec un naturel et un flegme savoureux. S’il évite de justesse de se faire embarquer dans un traquenard, un jeune dandy hippie essayant de coucher avec lui grâce à une annonce ambiguë dans un journal, il finit par côtoyer un groupe de jeunes qui partent à la montagne, où il découvre ce qu’est la neige. L’occasion de tomber amoureux de nouveau et de se mettre en couple avec une autre jeune femme blanche (merveilleuses séquences)… qui a déjà un amant et qui va donc, elle aussi, le rejeter…

    On le comprend rapidement, Paul / Gabriel peine à trouver sa place, dans cette Amérique qui cherche à le définir et à le mettre dans des cases, sans jamais réussir à le prendre tel qu’il est : un être humain comme un autre, digne d’estime et d’amour, avec des racines qui comptent pour lui, des fêlures, des rêves et des espoirs…

    A la fin du film, la réalité rattrapera la fiction et Paul, qui va subir dans sa chair et moralement la violence de la police et de l’Etat américain, particulièrement durs avec les personnes ayant des origines africaines…

    « Bushman » vaut pour la finesse de son écriture, d’une acuité inouïe pour l’époque, ce qui explique sans doute son triste parcours : tourné en 1968, prêt à être distribué en 1971 aux Etats-Unis, il ne le sera qu’en festivals, les circuits de distribution classiques en salles de cinéma ayant refusé de diffuser ce film, pas assez commercial et trop inclassable…

    Aujourd’hui on savoure d’autant plus ce côté « inclassable » : film d’auteur réalisé par un cinéaste-musicien blanc, c’est probablement l’un des meilleurs films évoquant l’Afrique et les Afro-Américains. Il faut dire que David Schickele sait de quoi il parle : pacifiste, il a été coopérant au Nigéria au sein du Peace Corps pendant plusieurs années plutôt que de partir faire la guerre au Vietnam, et c’est au Nigeria qu’il a rencontré Paul Eyam Nzie Okpokam, qui va jouer dans un premier film de Schickele, sorte de docufiction intitulée « Give Me a Riddle ».

    Dans « Bushman », on ressent toute l’affection de Schickele pour Paul, qui occupe la majorité des plans, offrant son visage sculptural au spectateur. Une sorte d’énigme vivante et attachante, que personne n’arrive décidément à percer. Et c’est peut-être ça la magie de « Bushman » : un film formellement éblouissant, avec des prises de vue magnifiques, une sublime BO (pop et soul), un montage organique et poétique… et Paul Eyam Nzie Okpokam, visage d’une humanité blessée et incomprise.
    Anne CC
    Anne CC

    10 abonnés 70 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 21 mai 2024
    Drame américain (1971). entre fiction et documentaire, film tourné en 1969, copie restaurée en un sublime noir et blanc.

    Un homme fuit la guerre au Nigéria. Il raconte, décrit sa vie au Nigéria, son quotidien, les traditions,... Sa vie d'immigré à San Francisco est ponctuée de rencontres amoureuses dans les milieux étudiants.

    Racisme, expatriation, démocratie. spoiler: Le documentaire bascule dans la réalité quand l'acteur est arrêté pendant le tournage, par deux fois de façon arbitraire, jusqu'à son expulsion en décembre 1969.


    Superbe performance de l'acteur ! Très intéressant, à voir ! spoiler:
    mathieu leblanc
    mathieu leblanc

    1 abonné 10 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 16 mai 2024
    C'est l'histoire d'un voyageur au pays de la terre promise. Celle de Gabriel, Nigérian ayant fui son pays en guerre, en plein San Francisco soixante-huitard. Et tandis que l'Amérique bouillonne - leaders noirs qu'on assassine ; émeutes qui explosent ; villes qui s'embrasent - lui, le Bushman traversé de souvenirs d'Afrique, pérégrine, chaussures sur la tête. Qu'il est merveilleux ce film où les effets de réel - déambulations documentaire, confessions face cam... n'empêchent en rien l'émergence de la douceur d'un conte. Oeuvre pleine de lumière dans des landes de ténèbres. Le voyage dans l'espace temps existe. Il s'appelle cinéma.
    Pascal
    Pascal

    159 abonnés 1 644 critiques Suivre son activité

    2,0
    Publiée le 5 mai 2024
    Tourné en 1969 et inédit en France, "Bushman" conte en un peu plus d'une heure, le parcours d'un immigré nigérian, en situation irrégulière dans l'Amérique de la guerre du Vietnam.

    Entre documentaire, film expérimental et regard acide sur le pays de la Liberté, on pense parfois aux futurs premiers titres de Jim Jarmusch, voire, de loin, à l'univers de Cassavetes.

    Portrait d'une errance qui se combine à l'expatriation, le saut culturel, " Bushman" souffre néanmoins d'une colonne vertébrale.

    Témoignage certes, mais pas indispensable et surtout largement surcoté par la critique.
    Pascale Saint-dizier
    Pascale Saint-dizier

    3 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 29 avril 2024
    Beau film très intéressant, intelligent,subtil, émouvant,poignant ,bien filmé et bien joué , absolument pas daté.Une pépite .
    takeshi29
    takeshi29

    8 abonnés 33 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 19 avril 2024
    Film d'une liberté folle, d'une grande puissance politique, le tout emballé dans un très beau noir et blanc. (Vu dans le cadre d'un prévisionnement exploitants)
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