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    La Ferme des Bertrand
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "La Ferme des Bertrand" et de son tournage !

    Une longue histoire

    Gilles Perret connaît la ferme des Bertrand depuis toujours, puisque leur maison est à moins de 100 mètres de chez lui : "Tout gamin, je m’amusais dans la ferme, j’étais avec eux sur les tracteurs. Je les connais très bien". Par ailleurs, ce n’est pas la première fois que le réalisateur a filmé les Bertrand : "En 1997, je voulais filmer les gens autrement que ce qui se faisait et ce que je faisais pour les actualités et les magazines, en prenant le temps, en étant vrai. Comme j’étais à l’aise avec une caméra, j’en ai emprunté une à une boîte de production avec laquelle je travaillais souvent. Je voulais filmer les Bertrand parce que je les trouvais formidables."

    "Je les ai filmés sur un an, en 1997 donc, et cela a donné Trois frères pour une vie. C’était en toute méconnaissance car j’ignorais à l’époque ce qu’était un documentaire. Je n’avais aucune culture cinéphilique, dans le milieu dont je suis issu cela n’existait pas. Le film a été primé dans des festivals de films de montagne. Il a été montré dans la région, où il a marqué les gens. Mais c’est tout."

    Un film de 1972

    En 1972, Marcel Trillat avait filmé les Bertrand pour un de ses films destiné à la télévision. Gilles Perret se rappelle : "Je suis né en 1968, j’avais donc 4 ans. Mais j’en avais encore le souvenir, parce que la télé qui débarquait dans notre hameau complètement perdu, ça avait été un sacré événement ! Le film de Marcel Trillat, d’une durée de 26 minutes et tourné en 16 mm, a été réalisé dans le cadre d’une association qui s’appelait « Télé promotion rurale »."

    "Cette association avait un créneau sur FR3 région l’après-midi, pour que les paysans puissent regarder. Trois ou quatre minutes sont consacrées aux Bertrand. On voit la sensibilité de Marcel Trillat qui leur pose des questions, justes et non complaisantes, et leur donne du temps pour parler. Je m’inspire un peu de lui, j’ai toujours aimé son travail."

    Naissance du projet

    Gilles Perret a toujours pensé que Trois frères pour une vie méritait une plus large diffusion. Le metteur en scène précise : "Or, Marc et Alex m’ont dit qu’Hélène allait bientôt prendre sa retraite, et qu’ils investissaient donc dans des robots de traite. Nous étions 25 ans après mon premier film avec eux, qui lui-même est arrivé 25 ans après celui de Marcel Trillat. C’était le moment de les filmer, avec l’idée d’utiliser ces deux anciens films. Je les ai filmés comme en 1997, c’est-à-dire de temps en temps, mais avec plus de facilité. D’abord matériellement, parce que maintenant j’ai une caméra, mais aussi dans l’approche."

    "Ce n’est pas que c’était compliqué avec les oncles mais les jeunes avaient en tête Trois frères pour une vie, et ils ont vite compris ma façon de faire. Ainsi, il leur arrivait de parler devant la caméra sans que j’aie besoin de leur poser de questions. En outre, je les connais depuis qu’ils sont nés. C’est plus facile pour moi d’aborder les questions intimes avec eux qu’avec les oncles, d’autant qu’en 1997, je n’avais que 28 ans."

    Difficulté

    L’enchevêtrement des différentes périodes dans le récit a constitué la principale difficulté dans la conception de La Ferme des Bertrand : "La date de chaque film est mentionnée mais une seule fois. Au cours du montage, avec Stéphane Perriot, nous nous sommes aperçus qu’il fallait du temps pour s’installer dans chaque période, sinon cela ne fonctionnait pas. Pour basculer d’une période à une autre, nous avons cherché le meilleur moment, une saison, une réflexion, un geste, pour que ce soit le plus fluide possible. Pour ce travail, nous n’étions pas trop de trois, Marion Richoux, Stéphane et moi."

    Evolution historique

    La Ferme des Bertrand montre l’évolution de la pénibilité du travail sur un demi-siècle. On passe de l’image des trois frères cassant des cailloux en 1972, jusqu’à l’arrivée des robots de traite. Gilles Perret explique : "On pourrait critiquer l’arrivée des robots, qui serait la marque du productivisme ou de la déshumanisation. Mais quand Hélène dit qu’elle a les épaules et les mains défaites et que les robots la remplaceront avantageusement, de quel droit les juger ? L’appellation Reblochon les contraint à traire 365 jours sur 365 le matin et le soir. Je ne me sens pas légitime pour savoir si c’est bien d’installer des robots ou pas."

    "La mécanisation a amélioré le sort des travailleurs, en particulier sur les tâches pénibles ou répétitives. Mais les patrons ont augmenté les cadences et les objectifs de production. Ce qui fait que les conditions de travail se sont quand même dégradées psychologiquement et physiquement. Les Bertrand ne sont pas dans cette logique."

    Agriculteurs VS ouvriers

    Gilles Perret a tenu à conserver au montage la séquence où Alex dit que son travail d’avant était plus dur, malgré la contrainte quotidienne de la ferme. Le cinéaste justifie ce choix : "Dans l’esprit des paysans, l’impression demeure que les ouvriers sont des feignants par rapport à eux. Dans l’industrie et dans l’économie de services, les conditions de travail et les ambiances au boulot sont devenues souvent plus pénibles que ce que connaissent les agriculteurs. Ceux-ci, s’ils ne sont pas écrasés d’emprunts, gèrent leur temps avec plus de souplesse."

    "En outre, contrairement aux oncles, ils ont des enfants, une famille, il leur faut donc aménager le temps. La conclusion de cette modernisation, c’est que là où la ferme générait trois salaires sur un peu plus de 100 hectares, il n’y en aura désormais plus que deux. C’est aussi la question que pose l’arrivée des robots mais comme dans tous les autres secteurs d’activité."

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