Ce n’était pas la première fois qu’on accordait à un groupe de rock le droit de posséder son propre film, qu’ils le tournent eux-mêmes ou qu’ils confient cette mission à quelqu’un de plus ou moins réputé (et de plus compétent). Toutefois, ‘True stories’ demeure un cas à part : s’ils possédaient une réputation bien établie en 1986, les Talking Heads ne pouvaient pas être considérés comme un gigantesque succès commercial dont on aurait autorisé tous les caprices et David Byrne n’a pas profité de l’opportunité pour se payer un egotrip grossier. En fait, on peut estimer que ‘True stories’, l’album, fut la bande-son d’un film, ou plutôt d’un non-film, ou bien que ‘True stories’, le film, fut le videoclip narratif à rallonge des titres de l’album. Inspiré par les titres raccoleurs de ces feuilles de chou remplies de faits divers, Byrne se balade tout au long du film dans une petite ville texane dont il se contente d’observer les habitants, leurs secrets, leur histoire et leurs rites : couples en crise, célibataire esseulé, pasteurs complotistes ou employés d’une grande compagnie paternaliste. L’objectif n’est pas de révéler des secrets ou de dénouer un mystère ; en fait, il n’y a même pas d’objectif à proprement parler car ‘True stories’ ne va nulle part, et la vision de Byrne reste en toutes circonstances bienveillante et amusée. Si son esthétique kitschounette et son absence de fil conducteur compréhensible rapprochent effectivement ‘True stories’ des clips musicaux des années 80, son concept évoquerait plutôt une version primitive et non-interactive des ‘Sims’. Si on peut encore apprécier cette vision gentiment caricaturale, proche de celle d’un Soap, d’une petite ville américaine des années 80, de là à dire qu’il s’agit d’un grand film, il y a un pas que je ne franchirai sûrement pas. ‘True stories’ reste avant tout une curiosité plus ou moins expérimentale, qui séduira peut-être les fins connaisseurs de l’univers des Talking Heads...dont je ne fais malheureusement pas partie non plus.