On tient probablement là la claque horrifique de l’année. Et, une fois n’est pas coutume, celle-ci nous arrive d’Argentine, pas forcément une contrée reconnue pour ces productions de genre contrairement à sa cousine espagnole. Durant plus d’une heure et demie, le cinéaste Demian Rugnia, dont c’est seulement le second long-métrage, nous immerge dans un cauchemar éveillé au rythme frénétique, au propos nihiliste et aux visions d’horreur et de violence presque insoutenables. Sur un canevas assez classique du Mal qui se répond entre la possession démoniaque (pour une fois sans connotation ou aspect religieux) et le film apocalyptique de zombies, il tisse un grand huit d’épouvante et de douleur dont on ne ressort pas indemne. On pense à deux autres bombes horrifiques mais bien moins définitif dans l’horreur et le malsain que cette pellicule-là : « It follows » en ce qui concerne cette menace qui s’incarne dans n’importe qui et n’importe quoi et « La Secte sans nom », le premier film sombre et désespéré sur le Mal de Jaume Balaguero. Quant au final ici, il fait froid dans le dos et fait un peu penser à celui de « The Mist » par Franck Darabont pour son défaitisme.
Bref, aucune lueur d’espoir ici, pas de happy-end et encore moins de moments de répit. « When Evil lurks » est un film d’horreur extrême, jusqu’au-boutiste et cauchemardesque qui pourra en mettre plus d'un mal à l’aise et qui va hanter les nuits de pas mal d’autres. On ne peut qu’être traumatisé par certaines séquences choc, entre gore, saillies de violence inattendues et une ambiance putride, glauque et mortifère comme on en voit peu. Un film d’horreur très intense et véritablement effrayant mais loin d’être bête, qui le courage de ses idées et qui veut faire plaisir à son public de A à Z. Fait très rare, il malmène même des enfants lors d’une séquence proprement incroyable qui vous scotche à votre siège et dont on gardera la surprise pour encore plus de bonds de votre siège.
Dès les premières minutes, on entre dans le vif du sujet avec la découverte de celui par qui le mal va se répandre : la fratrie composée de ces deux fermiers qui sont les personnages principaux va trouver dans une maisonnette voisine après avoir entendu des coups de feu un « pourri » ou un « infecté » comme ils le disent dans cette région rurale. Quelqu’un d’infecté par le Mal ou le Démon ou Satan, on n’aura pas plus de précisions. Sa représentation est un véritable tour de force technique en plus de nous horrifier : une espèce d’obèse fait de tumeurs géantes et suintantes rongé par la putréfaction jusque dans ses entrailles. Plusieurs séquences avec cette abomination presque plus humaine vont nous retourner le cœur. On peut donc dire que cela commence sur les chapeaux de roue surtout que deux autres scènes du même acabit avec des animaux, des femmes (celle de l’affiche) et des enfants vont nous faire ressentir la même chose.
Et peut-être que c’est l’un des petits défauts de « When Evil lurks » : Rugnia y va à fond et nous en envoie plein le visage en nous mettant KO dès le départ avec une succession de séquences génialement éprouvantes, aussi terrifiantes que malaisantes. Cela rend donc la seconde partie un peu moins surprenante bien qu’elle soit très bien également. On a l’impression qu’il livre ses meilleures cartouches trop vite même si la fin est, plus moralement que visuellement d’ailleurs, dérangeante. Attention, pas que la seconde partie soit radine dans l’horreur et le gore, il y en a encore mais de manière moins radicale, frontale et impressionnante. Et il manque peut-être aussi de moments pour souffler tant on s’en prend plein les yeux et les oreilles non-stop (mais difficile de se plaindre d’un film qui ne nous laisse aucun répit).
Enfin, certaines zones d’ombre sont salutaires et quelques questions ouvertes laissent place à l’imagination (comme le devenir d’un rejeton du Mal dont on n’a pas su empêcher la naissance). Le film a, en outre, le mérite de se dérouler dans un cadre rural rare (la pampa argentine) et de montrer comment vivent les paysans. Quant en plus les maquillages et les effets sont impeccables, on peut donc clairement affirmer qu’on a affaire à une petite bombe de l’horreur et du fantastique. Peut-être même le meilleur avatar du genre depuis longtemps, loin des bêtises de la plupart des films de genre actuels (coucou Blumhouse ou le Conjuringverse) mais pas aussi réflexif et parfois ennuyant que les prestigieux rejetons issus de la mouvance « elevated horror » (« Midsommar » ou encore « It follows » justement). Une claque à tous niveaux qui sait instaurer une ambiance délétère et gênante en plus de mettre en scène l’horreur comme un vieux routard, l’énergie en plus. Une petite pellicule à découvrir de toute urgence pour avoir une sacrée dose de frissons mais à éviter si on est sensible ou si on veut éviter tout malaise, vraiment.
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