"L'Ombre du feu" est la rencontre entre une tenancière de bar veuve, un orphelin voleur et un soldat démobilisé dans le Japon d'après-guerre. Le réalisateur de "Tetsuo" explore leur tentative de former une famille malgré les blessures profondes laissées par leur passé. Ce long-métrage radical se distingue par son approche unique, bien qu'il éprouve des difficultés à susciter une réelle émotion.
Sans peu de doutes le meilleur film de l'année, magnifique mutation du cinéma de Tsukamoto qui intériorise davantage la brutalité qu'il veut mettre en scène (initié lors de son dernier film Killing).
Même si le film est appuyé ici et là, un peu surjoué (par l’actrice principale), assez bancal entre ses différentes parties et questionnable en matière de choix esthétiques (image numérique pour film d’époque), il marque par son mystère décadent et par sa noirceur finale. Le réalisateur assume pleinement cette plongée dans le glauque et dans le traumatique, pour évoquer un après-guerre où règnent misère, déshumanisation et violence. Expressivement, c’est fort, à défaut d’être totalement convaincant.
Pour oublier la guerre qui ne les oublie pas, bien qu’elle soit terminée, un soldat démobilisé, un gamin et une prostituée se retrouvent comme une famille dans un lieu qui leur sert à peine d’abri. Le cinéaste prend à témoin l’enfant qui à sa façon nous prend lui aussi par la main (Oga Tsukao, extraordinaire) pour nous montrer l’état de son pays défait, et comment les hommes imaginent s’en remettre. C’est assez brut, très réaliste et minimaliste à la fois, laissant remugles et rancœurs s’évacuer avant de mettre en avant le peu d’espoir que suscite l’enfant aux épaules si fragiles. Mais nous dit le réalisateur il n’y a pas d’autre issue. Ce qui nous procure une scène finale éloquente, et rassurante effectivement. Pour en savoir plus : lheuredelasortie.com
C'est lourd, c'est noir, c'est crasseux. Une première partie où le huis clos pourrait se passer à n'importe quelle époque. Puis les scènes extérieures montrent réellement l'horreur et les ravages de l'après guerre. Assez dérangeant dans sa globalité (prostitution, mort, violence presque barbare)
Ce film nous fait partager avec intensité les modes de survie de plusieurs personnages aux lourdes conséquences de la seconde guerre mondiale. La jeune prostituée et l'orphelin chapardeur, entre autres, y sont magistralement interprétés dans des décors très explicites et nous emportent dans leur volonté de vivre et de se relever avec fierté. Survivance de l'esprit samouraï !!
Le nombre de films consacrés à la situation tragique du Japon, dans l'immédiat après-guerre, ne manquent pas, notamment tournés dans les années 50, chez Kinoshita, Kobayashi ou Naruse, par exemple. L'ombre du feu de Shunya Tsukamoto témoigne que le traumatisme, alors que de nombreuses années ont passé, reste vif dans la mémoire collective. Une veuve et un orphelin, victimes collatérales, ainsi que deux anciens soldats, survivent à peine dans un film qui pourra être jugé aride dans sa première partie, avec une grande économie de mots et dans un lieu unique, alors qu'à proximité, dans les ruines de Tokyo, la vie reprend tant bien que mal. Plus loin dans L'ombre du feu une scène hallucinante dévoile mieux le propos de Tsukamoto à propos des ravages incommensurables dus aux atrocités de la guerre. Le cinéaste est un grand styliste et nombre de plans du film sont admirables mais ses partis-pris et le côté parfois énigmatique des comportements de ses personnages principaux, s'ils accentuent l'intérêt et compensent les longs moments de flottement, donnent parfois le sentiment que Tsukamoto cherche avant toute chose à impressionner son monde. Non qu'il soit insincère mais dans un geste artistique un peu trop conscient de ses effets.