Le déclin d’une profession
Alix Delaporte est déjà l’heureuse réalisatrice de 2 excellents films, Angèle et Tony et Le dernier coup de marteau. Mais c’était il y a 10 ans. Depuis, elle s’est consacrée au scénario pour Canal+ avec la série Tapie. Elle revient au grand écran avec ces trop courtes 73 minutes. Gabrielle, 30 ans, intègre une prestigieuse émission de reportages. Elle doit très vite trouver sa place au sein d’une équipe de grands reporters. Malgré l’engagement de Vincent, leur rédacteur en chef, ils sont confrontés au quotidien d’un métier qui change, avec des moyens toujours plus réduits, face aux nouveaux canaux de l’information. Habités par leur passion pour la recherche de la vérité, leur sens de l’humour et de la solidarité, ils vont tout tenter pour retrouver la foi de leurs débuts et se réinventer. Un hommage lucide au vrai journalisme de terrain et aux petits soldats de l’info qui le pratiquent encore.
On critique souvent la durée excessive des films d’aujourd’hui. Pour une fois, quitte à prendre le contre-pied de mes positions habituelles, je regrette que ce magnifique petit film ne dure qu’à peine une heure et quart, alors qu’il y avait tant à dire et à montrer sur un tel sujet. Au point que la fin semble bâclée et qu’on a l’impression qu’Alix Delporte n’a pas su vraiment quoi faire des différents axes dans lesquels elle nous avait embarqués, - sans jamais pour autant les approfondir -. Quel dommage ! Car la réalisatrice a une tendresse particulière pour ce métier de reporter où elle a fait ses débuts comme journaliste-caméraman à l’agence Capa. Elle commente à ce sujet : nos expériences, peu importent les détours, sont presque aussi importantes que le résultat qu’on atteint ou qu’on souhaite atteindre. Elle interroge donc le spectateur sur la nécessité de préserver la fonction du journaliste, à savoir la recherche de la vérité. Ce qui ressort de ce constat amer, c’est que le métier n’est pas menacé par les journalistes, mais par les financiers qui prennent le pouvoir dans les rédactions et pour qui les reporters de terrain deviennent un luxe inutile. Parler de la fin d’une émission de grands reportages, c’est parler des changements d’une époque. Un film passionnant et passionné, sans un temps mort, sans pathos et sans compromission avec la réalité. A voir.
Côté casting, c’est impeccable. D’Alice Isaaz à Roschdy Zem, en passant par Vincent Elbaz, Pascale Arbillot, Pierre Lottin et Jean-Charles Clichet, - deux acteurs dont on ignore trop souvent le grand talent -, Grégoire Leprince-Ringuet, tout le monde est à sa place, sobre, juste, convaincant et convaincu. Un film brut et sincère sur des journalistes « vivants »… mais encore pour combien de temps ?