Festival de Cannes, on est l'intrus de la salle. On doit être le 1% des spectateurs à ne pas savoir qui est Marcello Mastroianni (oui, oui, vous pouvez nous envoyer les tomates), et à avoir apprécié que le film ne nous prenne pas de haut pour cette inculture. Marcello Mio nous a touché, car plus qu'un portrait de famille célèbre (dont on ne savait rien), il évoque avec beaucoup de sensibilité le lien père-fille trop vite rompu, la catharsis de faire revivre un mort pour pouvoir lui dire ce qu'on n'a pas eu le temps d'avouer, pour comprendre ce mystérieux papa en marchant dans ses traces, pour rejouer cette dispute qui nous manque, pour panser la disparition qui fait mal, même si cette illusion n'est qu'éphémère. C'est là que Marcello Mio nous a attrapé, quand on pensait que tous les personnages allaient moquer bassement le déguisement de Chiara Mastroianni en son père, on fonce directement dans la catharsis à laquelle tout le monde veut croire, car tous les "personnages-personnes" en ont besoin (on est peut-être trop cœur d'artichaut pour ce monde, mais cela nous a touché). Un peu comme si l'on voulait démontrer avec tendresse et simplicité la fameuse phrase "Lorsqu'on rêve tout seul, ce n'est qu'un rêve, alors que lorsqu'on rêve à plusieurs, c'est déjà une réalité." (Camara), une phrase-mantra qu'on adore retrouver dans les scénarios au cinéma, alors voici que revit un papa, un mari, un réalisateur célèbre. Comment bouder aussi tous les rôles-biopics de chaque personnage (les ex-compagnons de Chiara jouent leur propre rôle...On rêve d'ex aussi sympa), offrant à Chiara un personnage sur mesure (très touchant), à Deneuve l'occasion de prouver (encore) qu'elle est impeccable dans le registre comique (si Mauvaises Herbes ne vous l'avait déjà pas prouvé), et Fabrice Luchini en roue libre (comme d'habitude). La fin est clairement bâclée, mais le contenu du film nous a embarqué émotionnellement, et on s'est pris à aimer quelques plans (la dispute "à table" en noir et blanc), et rigoler souvent en compagnie d'un casting qu'on sent vraiment soudé. Allez, on ajoute encore la jolie BO de Benjamin Biolay, et on retourne nager dans cette fontaine de Jouvence d'un Cannes jusque-là très pompeux. Un bain qui fait du bien.