Ma hantise d’un cinéma qui ne parle qu’à lui-même, je l’ai consommée face à Deuxième Acte de Quentin Dupieux.
On pourrait, avec Marcello Mio, retrouver les racines d’un même culte. Il n’en est cependant rien, puisque l’un nous livre une fable d’acteurs pour les acteurs, l’autre nous laisse pénétrer une poésie déguisée sous forme de réunion de famille.
Certes, rien ne surprend dans Marcello Mio. Pas même la transition temporaire de Chiara dans la peau de son père, premièrement car elle est véritablement une part de son identité, deuxièmement car la tonalité psycho-philosophique du scénario suit les règles du cinéma français à la lettre.
Ce rigoureux suivi, il nous gêne. Contrairement à ce que j’ai pu lire, le film n’a rien d’un Vaudeville. Mais il n’est pas innovant, ni même haletant. Au contraire, je me suis senti tel le public d’un discours d’hommage un peu trop privé face à un public un peu trop public. Est-ce réel ? Cet appartement est-il le leur ? Ce doute est-il le sien, cette amitié a-t-elle quelque chose de vrai ? Dans l’appartement de son enfance, je me sens plus proche d’elles que d’un propriétaire qui ouvre grand ses portes à un destin venu retrouver ce qu’il pense être son passé… et pourtant, il y a une part de lui en nous : le cast et Christophe Honoré ne réalisent ici pas un long-métrage pour le public, ni même pour son public, mais pour tracer un bout de chemin ensemble, et tracer l’empreinte d’une union qui ne l’a jamais été dans les bans.
Malgré tout, je l’ai dit, je ne me suis pas ici senti si étranger au scénario que face à Deuxième Acte. Et pour cause, l’hommage pudique a beau nous rendre souvent un peu trop curieux, il est écrit dans notre langue. Celle des connaisseurs parfaits ou en herbe du cinéma de Mastroianni. Celle d’un public acculturé au jeu de Michel Bouquet, aux envolées d’un Luchini qui nous dit s’effacer mais au contraire laisse ici tout son persona précisément écrit au fil du temps éclater. Celle des frères, sœurs, des enfants et petits-enfants d’une Deneuve devenue mère du cinéma, ici mère au cinéma. Celle de ceux qui remplissent les auditorium de Biolay, s’émeuvent des mots et savent apprécier un « feat. » sans grandeur musicale mais empli de sens et d’émotions : la vraie musique.
Honoré ici va bien au-delà d’un hommage qu’il ne me revient pas de décrire, ce serait à la fois trop simple et trop inutile. Costumes, plans et textes sont des références successives à Mastroianni, c’est dit. Honoré va au-delà de cet hommage, quand il répond finalement à la commande de Cannes en 2024 : donner un sens au 7e art, qui donne à l’occasion l’impression d’un empire sans partition.
Se souvenir de ses origines, de son histoire, de ce qui a agité le cinéma français, qu’on le trouve profondément fascinant ou terriblement népotique, est certainement l’étape préliminaire nécessaire une la remise en question qui s’ouvre.
À voir.