Un homme perdu a été présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2007.
Ce film trouve son origine dans le rapport particulier qu'entretient la réalisatrice Danielle Arbid avec son pays, le Liban. " Je vis en France depuis des années, explique-t-elle, et avec le temps, j'ai l'impression de perdre de vue ce pays d'où je viens, comme un bateau qui disparaît à l'horizon. Comme si ma vie n'était ni tout à fait là-bas, ni tout à fait ici. C'est la raison pour laquelle je voulais raconter l'histoire de deux hommes, et non d'un seul. Deux hommes qui finissent par être le recto et le verso du même. Un Arabe et un Occidental qui se perdent, disparaissent, réapparaissent... Et qui finalement oublient d'où ils viennent. Mais si l'image de l'Arabe s'est vite imposée, le personnage de l'Occidental, était plus difficile à trouver. Je suis allée le chercher en m'inspirant des livres de William Vollmann et des photos d'Antoine d'Agata... "
C'est le producteur Marin Karmitz qui rendit possible la rencontre entre la réalisatrice Danielle Arbid et le photographe Antoine d'Agata. "Avec Antoine, explique la cinéaste, on se voyait quand il était de passage à Paris. On parlait pendant des heures. Je lui posais des questions sur sa vie, la photo, les filles qu'il rencontrait au bout du monde. Il me répondait clairement, généreusement. Il n'a pas participé à l'écriture du scénario. Il parlait seulement, et moi j'écoutais. Pourtant Un homme perdu n'est pas un film sur sa vie. Thomas Koré n'est pas Antoine d'Agata, mais une même violence l'habite, celle que je fantasmais, que je voulais toucher de si près. Je ne sais pas pourquoi je suis hantée par ces gens qui larguent tout, se perdent dans le monde et s'oublient, mais c'est chez moi comme une obsession, un rêve. Et Antoine l'a tout de suite compris. On parlait le même langage."
"J'avais envie de filmer des corps qui s'aiment, sans jugement, ni exotisme et d'inscrire ces relations dans le monde arabe... Faire un film charnel où la pulsion sexuelle prend toute sa place. Car mes deux héros sont obsédés, chacun à leur manière, par un semblable manque d'amour. Ils s'abandonnent dans les bras de femmes qui leur ressemblent. Chaque scène véhicule un sentiment singulier même si toutes ont en commun un côté accidenté, une consommation avide du sexe... car finalement se sont des rencontres passionnées, furtives."
Quatre mois avant le tournage, Melvil Poupaud avait lu le scénario et souhaitait jouer le rôle de Thomas Koré. Mais à l'époque, la réalisatrice Danielle Arbid avait choisi un autre acteur, en l'occurrence Laurent Lucas, "qui me semblait plus proche de l'âge du personnage que j'imaginais, plus mûr" explique la cinéaste. Trois semaines avant que ne débutent les prises de vue, celle-ci est finalement revenue sur sa décision... "En fait Melvil n'a jamais été très loin dans ma pensée, ajoute-t-elle. Quand on a commencé à travailler, il a tout lâché, s'est vite imposé. Il était comme une page blanche sur laquelle toutes les émotions pouvaient s'écrire. Ce que je cherchais en lui ne ressemblait à rien de ce qu'il avait déjà fait. J'ai voulu le réinventer. Et je l'ai vu, au jour le jour, se transformer mentalement et physiquement. Il m'a impressionné."
C'est en le voyant dans Syriana que la réalisatrice Danielle Arbid s'est décidée à choisir Alexander Siddig pour le rôle de Fouad Saleh. "J'ai tout de suite eu envie que ce soit lui, comme une évidence, commente la cinéaste. Alexander est très précis, très réfléchi. Il pouvait donner sa vision des choses, tout en discutant la mienne. Le rôle que je lui proposais était pourtant à risque ; mutique, entêté. Mais, je ne me lassais pas de le regarder jouer. Son visage véhiculait une nouvelle émotion, une nuance différente à chaque scène."
Les plus coquins auront reconnu dans le rôle de la fille marocaine l'actrice de films pornographiques Yasmine Lafitte, appelée à la rescousse par la réalisatrice Danielle Arbid pour tourner les scènes de sexe. Ancienne aide-soignante, cette comédienne a notamment signé un contrat d'exclusivité avec le producteur de films pour adultes Marc Dorcel.