Les Centres Médico-Psycho-Pédagogiques (CMPP) sont des institutions créées juste après la Seconde Guerre mondiale alors que de nombreux enfants souffraient de traumatismes et n'arrivaient plus à revenir aux apprentissages. Les plus grands noms de la pédagogie, de la psychanalyse et de la pédopsychiatrie se sont alliés pour proposer des accompagnements novateurs permettant aux enfants de retourner vers les apprentissages et vers la vie plus largement.
Né en 1946, le Centre Claude Bernard, où a été tourné le documentaire, est le premier des CMPP. Aujourd’hui, il en existe partout en France mais ils sont menacés de disparition.
Ce film est né de la rencontre entre Clara Bouffartigue et l’équipe du Centre Claude Bernard, qui s’est faite autour de son précédent film, Tempête sous un crâne. "J’ai découvert avec eux un autre regard porté sur l’enfance et sur ses difficultés qui m’a bouleversée. J’ai mis cinq années à réaliser ce film. J’ai d’abord assisté aux réunions des soignants puis je suis allée dans les séances de soin des patients qui acceptaient ma présence. J’ai été frappée par la place faite aux parents, par l’approche de l’enfant dans sa globalité qui prend toujours en considération son environnement."
La réalisatrice a choisi un titre qui renvoie à l'enfance et au jeu : "Loup y es-tu ? renvoie immédiatement à la comptine et à tous les jeux autour du loup. Il répondait à cette exigence. Il y a aussi cette idée que, quand on vient consulter, il y a peut-être un loup… Les patients arrivent souvent en pensant qu'il y a une difficulté ponctuelle, un enfant qui a des soucis en mathématiques ou qui s'agite en classe… Ils pensent que la question qui se pose c'est ce symptôme et que, quand on y aura répondu, il va disparaître. Mais ils découvrent vite que les choses sont plus complexes, qu'elles sont en lien avec tout un environnement dont les parents font partie."
La réalisatrice voulait défendre une approche très humaine du soin, à l'heure où les liens humains et sociaux sont menacés par "l'orientation de notre société, gouvernée par des logiques de rentabilité et d'évaluation". Elle précise : "Alors oui, je vois Loup y es-tu ? comme un manifeste. Un manifeste pour les soignants mais aussi pour chacun de nous parce qu’il tente de déstigmatiser l'image qu'on peut avoir du soin psychique qui véhicule encore beaucoup de clichés, de fantasmes et de craintes. Et puis il y a une tendance aujourd’hui à diviser, qui ne se limite pas au monde du soin. Pourquoi faudrait-il choisir entre une approche qui tienne compte du psychisme et une approche qui tienne compte de tout ce qui est neuro-comportemental ? Loup y es-tu ? défend une approche qui met la personne au centre du soin et non pas le symptôme. C'est peut-être ma manière de faire des films politiques qui n'ont pourtant pas la forme de films militants."